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Étude : la création artistique représenterait 1,6 % de l’empreinte carbone française

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empreinte carbone

L’étude de la Direction générale de la création artistique présentée début juillet pose les bases de travail pour accélérer la réduction des émission de gaz à effet de serre du secteur.

La direction générale de la création artistique vient de présenter au Festival d’Avignon son étude sur l’empreinte de la création artistique qui révèle que les émissions de gaz à effet de serre (GES) du secteur des arts visuels, du spectacle vivant et des enseignements artistiques représentent 1,3 % de l’empreinte carbone de la France (soit 8,5Mt CO²e). À titre de comparaison, le transport aérien intérieur s’élève à 0,7 %, celle du numérique à 4,4 % et celle du tourisme à 14 %. Pilotée par la DGCA, cette étude a été réalisée par le cabinet PwC (PriceWaterhouseCoopers) avec l’aide du Département des études, de la prospective, des statistiques et de la documentation (DEPS-Doc) du ministère de la Culture. Ces résultats sont au-dessus des hypothèses de départ et sont principalement tirés vers le haut par les déplacements des publics, mais aussi par les « achats » des structures. 

Des déplacements très émetteurs
Au sein de la création artistique, le spectacle vivant est de loin le plus producteurs de GES et, dans le spectacle vivant, ce sont assez logiquement les festivals de musique qui globalement sont les plus émetteurs, et de loin. Car dans les faits, et sans surprise, les principaux postes d’émission de GES du spectacle vivant sont, en moyenne, les déplacements de spectateurs (38 %), les achats (25%), l’énergie (10%), les déplacements des artistes (9%), les immobilisations (10%) et les déplacements de salariés (6%). On observe toutefois de larges disparités selon les labels et les genres. Ainsi, pour un festival de spectacle vivant hors musique, les déplacements comptent pour 67% des émissions quand c’est 57 % pour un festival de musique. Mais au sein des mêmes festivals de musique, le poste « déplacements des publics » peut être responsable de 40 % des émissions (Festival de la Paille) ou de 78 % (Les Suds). 
Lancée afin de pallier le manque de données sectorielles, cette étude s’est appuyée sur des  référents carbone afin de travailler sur un échantillon (il compte de 3 à 10 bilans carbone par label, CCN, CDCN, CDN, Cnarep, PNC, SMAC, SN, orchestres nationaux en régions, festivals, opéras). Ce qui a permis de déterminer les principaux postes d’émissions et de formaliser un plan d’action collectif. L’objectif de cette démarche est aussi de changer l’avenir. En tête, l’Europe doit réaliser -50 % d’émissions en moins à l’horizon 2030.

Jérôme Vallette

En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°586

Crédit photo : D. R.

Observatoire des politiques culturelles : 47 % des collectivités ont un budget Culture en baisse entre 2024 et 2025

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graphique budget culture

Les données présentées à Avignon cet été confirment les remontées de terrain et inquiètent des professionnels qui redoutent que le scénario s’amplifie en 2026.

Le Baromètre 2025 sur les budgets et choix culturels des collectivités territoriales présenté par l’Observatoire des politiques culturelles (OPC) à Avignon rejoint clairement toutes les alertes de terrain : 47 % des directions des affaires culturelles qui ont répondu à l’enquête évoquent une baisse de leur budget « culture » total « avec une situation qui diffère selon les collectivités », précise toutefois Samuel Périgois, chargé de recherche à l’OPC. 58 % des régions sont en baisse, 63 % des départements, 36 % des communes (de plus de 50 000 habitants), 25 % des métropoles ou encore 36 % des agglomérations. 
De manière globale, 26 % de ces budgets culture baissent entre 5 % et 20 %, et l’enquête relève même chez 7 % des répondants une chute de plus de 20 %. La culture n’est toutefois pas moins bien lotie que les autres, car 40 % des collectivités qui ont répondu voient leur budget primitif global baisser entre 2024 et 2025. Et certaines de manière très nette (4 % des collectivités de plus de 20 %). L’année dernière, seules 15 % des collectivités évoquaient un budget primitif global en baisse. « Il y a de vraies évolutions avec des baisses très marquées : nous voyons que la situation budgétaire des collectivités s’est nettement dégradée », synthétise Samuel Périgois. 

Fonctionnement et subventions en berne
Sur les seuls budgets culturels de fonctionnement, « les 2/3 des régions et 70 % des départements déclarent une baisse », détaille Samuel Périgois, « et seuls 11 % des départements déclarent une hausse ». Sur ces seuls budgets, 49 % des collectivités répondantes subissent une baisse. Et « tous les domaines sont impactés en fonctionnement (hors masse salariale) », souligne Samuel Périgois. Pour le spectacle vivant, c’est 35 % de baisse en fonctionnement, contre 41 % de stabilité et seulement 15 % de hausse.
Sur l’emploi culturel, ce sont les départements qui baissent le plus la voilure (38 % de baisse), devant les communes (27 %). Et sur le volet des subventions, qui a le plus touché les compagnies, 42 % des collectivités connaissent une baisse (12 % de hausse seulement) contre 11 % l’an dernier, avec des montants en chute dans près de 58 % des régions, 67 % des départements. Le bloc communal qui reste un partenaire majeur de la culture (80 % des dépenses) tient encore la culture avec près de 23 % de budgets en baisse.

Une mesure des évolutions budgétaires
Ce baromètre est réalisé en partenariat avec le ministère de la Culture et Régions de France, Départements de France, France Urbaine, Intercommunalités de France, Villes de France, Fnadac, FNCC, Culture·Co. Cette étude annuelle mesure en temps réel les évolutions des budgets des collectivités et leur positionnement sur la culture en examinant non pas des chiffres bruts, mais des évolutions. L’enquête est faite par questionnaire auprès d’un échantillon de 214 collectivités (départements, régions, communes de plus de
50 000 habitants, intercommunalités (avec villes-centres supérieures à 50 000 habitants). 
En parallèle, l’OPC produit cette année un focus territorialisé en région Auvergne-Rhône-Alpes
qui cible de plus petites communes et des territoires ruraux, avec un échantillon de 30 cibles. 

Jérôme Vallette

En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°586

Crédit photo : D. R.

Agora – Montpellier Danse : un pas de plus vers la structure définitive

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Agora – Montpellier Danse

L’ouverture du 45e festival Montpellier danse s’est déroulée dans une étrange atmosphère : si l’annulation de la venue de la Batsheva (lire ci-dessous) a privé beaucoup de professionnels du motif officiel de leur venue, rares sont ceux qui avaient annulé, manière d’hommage à la mémoire de l’historique. Le conseil de la Métropole a d’ailleurs voté une délibération baptisant la cour de l’Agora du nom de Jean-Paul Montanari, ce qu’une cérémonie – le 26 juin – a officialisé. 

Une association porteuse du label CCN
Pour la suite et malgré un calendrier particulièrement serré, l’équipe qui va diriger Montpellier Danse, Jann Gallois, Pierre Martinez et Hofesh Shechter, rassemblés autour de Dominique Hervieu devrait bien pouvoir signer les contrats d’embauche début septembre… Ce qui compte tenu de la complexité du dossier juridique était une gageure. Pour simplifier la situation, une association porteuse du label CCN devrait reprendre l’ensemble des activités de l’Agora de la danse / Montpellier, sous la présidence, sinon du maire de la ville, Michaël Delafosse, du moins sous son regard très vigilant. 

Mouvements dans l’équipe
Pour l’activité, l’équipe ne devrait pas changer profondément sauf quelques départs « naturel », comme le directeur technique, Didier Estrade, ou Mireille Jouvenelle, administratrice depuis très longtemps. On doit souligner que si Jean-Paul Montanari était connu pour avoir un caractère complexe, le turn-over de son équipe a toujours été quasiment inexistant. Plus important, le départ d’Anne Kerzerho, responsable pédagogique du master exerce à ICI — CCN de Montpellier, pour Marseille où elle va diriger le festival Parallèle, va amener la nouvelle direction (entendre Dominique Hervieu et Jann Gallois principalement) à se pencher immédiatement et directement sur l’organisation du dispositif pédagogique… 
Autres priorités : le territoire et les amateurs. Dominique Hervieu a déjà rencontré plusieurs partenaires locaux, comme Réseau Danse Occitanie, et compte intensifier ces contacts. Façon d’aller vite, mais prudemment pour celle qui rappelle qu’à 62 ans, elle n’a pas le projet de durer excessivement, Elle cale ses projets sur la succession des mandats des CCN (soit 4 ans puis, ensuite peut-être 3 ans, pas au-delà).

Philippe Verrièle

Annulation de la Batsheva : quelles conséquences pour Montpellier Danse?
L'annulation de la Batsheva qui devait ouvrir le festival étant le fait de la compagnie empêchée par la fermeture de l'espace aérien Israélien, Montpellier Danse n'encourt ni dédit ni pénalités. Mais l'équilibre financier reposant largement sur la billetterie des spectacles programmés au Corum, la perte de 6 000 places d'un coup en est un rude (en 2024, le festival avait réuni 34 000 spectateurs) !. Malgré toute les précautions Mireille Jouvenel l'estime à 50 000 euros et reconnaît que s'il est trop tôt pour tirer des conclusions définitives il ne sera pas possible d'effacer les conséquence d'un tel coup. 

En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°585

Crédit photo : D. R.

« Avec la fusion, nous retrouvons le sens d’une filière du spectacle vivant »

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Céline Portes et Vincent Roche-Lecca

Scène Ensemble est né le 1er janvier de la fusion du SNSP et de Profedim. Le nouveau syndicat a fait le choix d’une coprésidence portée par Céline Portes et Vincent Roche-Lecca.

Quel est le poids de Scène Ensemble six mois après sa création ? 
Vincent Roche-Lecca : Nous approchons aujourd’hui les 500 membres, avec des typologies d'acteurs et d'actrices du spectacle vivant subventionné très divers. Du coup, nous avons une approche un peu plus d'ordre de la filière, entre des ensembles artistiques, des scènes permanentes, des festivals...

La coprésidence s’est-elle imposée comme une évidence ? 
Céline Portes : C'était une évidence et une nécessité, car il y avait toute une confiance à créer en tant que syndicat unifié. Il fallait rassurer nos adhérents sur le fait qu'on ne perdrait aucune technicité dans nos expertises. C’est absolument passionnant, car nous retrouvons comme le dit Vincent le sens d'une filière du spectacle vivant avec les producteurs, les diffuseurs, et tout le sens de nos interdépendances dans cette filière. Cette coprésidence représente aussi cette chaîne. 

Pourrait-on envisager d’autres rapprochements  ? 
V. R.-L. : J’espère que certains vont y voir un signal pour venir toquer à la porte ! Nous arrivons au bout d'un système d'organisation du spectacle vivant, dans un secteur, une branche, assez balkanisée, peuplée de microentreprises et de chapelles. C’est aussi le sens de l'histoire de ce secteur, qui va devoir se serrer les coudes. Mais la peinture est encore très fraîche chez nous et ce sont des choses qui se discutent sur le long terme. Il y a aussi des familiarités déjà existantes avec les Forces musicales et le Syndeac, avec lesquels nous sommes regroupés au sein de l'USEP-SV.
C. P. : On peut toujours imaginer ouvrir plus loin, mais il faut déjà stabiliser Scène Ensemble. Nous avons déjà doublé, triplé, le spectre des thématiques et des enjeux à prendre en charge.  Nous sommes plus forts ensemble, mais est-ce qu'il faut devenir toujours plus gros ? Vincent a raison d’évoquer l’USEP-SV parce que nous avons de vrais combats en commun.

Vous avez une feuille de route avec cinq axes. Mais si vous deviez choisir, lequel serait prioritaire ? 
V. R.-L. : Nous pesons un vrai poids économique et c’est très bien d'avoir argumenté là-dessus, mais peut-être a-t-on un peu perdu de vue à quoi sert le service public de la culture. Le combat prioritaire, peut-être, serait de retrouver une petite musique séduisante à l'oreille pas seulement des spectateurs, mais aussi des décideurs et d’autres secteurs d'activité. Nous manions de l’argent public, ça coûte, mais ce n'est pas forcément le nombre d'entrées que l’ont fait qui est l’alpha et l’oméga. Derrière, c'est une société plus fraternelle, plus apaisée.
C. P. : Nous devons réaffirmer vraiment la question de l'intérêt général dans le service public de la culture. 

L’un des points de tension actuel est la baisse, parfois même l’effondrement du soutien des collectivités, pour des raisons parfois économiques, mais parfois aussi très politiques. Que comptez-vous faire ? 
C. P. : En effet, c'est assez vertigineux. Évidemment, il y a la question de la compétence partagée qui va être notre sujet prioritaire, même si le débat n'est pas forcément à notre avantage en ce moment, car des collectivités ont déjà fait le choix de dire que la culture ne les concerne plus. Il va falloir interroger le législateur.
V. R.-L. : On doit également renforcer le dialogue avec les élus locaux convaincus, qui peuvent faire contagion chez d'autres ou servir de boussole. Nous pouvons agir plus fortement auprès de leurs fédérations.

Êtes-vous inquiets à l’approche des élections municipales ? 
C. P. : Extrêmement inquiets. Nous regardons les cartes et nous voyons quelles collectivités pourraient basculer dans une zone de non-dialogue. Ce qui a changé, c'est que nous avons une extrême droite aujourd’hui armée idéologiquement, sur ce que devraient être aujourd'hui la proposition et l'offre culturelle de services publics. Il va falloir batailler sur le terrain des programmes, ce qui n'était pas le cas avant. Cela va nous obliger à préciser aussi certaines positions, à préciser exactement notre vision du service public de la culture.

Il y a l'extrême droite, mais on voit que certaines idées et postures ont essaimé dans la droite traditionnelle.
C. P. : Nous avons en effet un discours de remise en question plus généralisé sur la nécessité même de la culture. Avec Christelle Morançais par exemple, nous avons une vision très claire de ce que devrait être la culture : un divertissement pur et simple, rentable, avec une vision commerciale. Et c’est vrai que l’on ne s'attendait pas à ces attaques-là de ce spectre politique.
V. R.-L. : Nous serons impactés dès la saison prochaine par ces municipales. Je me souviens de 2014 : dans les mois qui ont suivi, de nombreux directeurs de théâtres de ville ont été débarqués… 

Propos recueillis par Bruno Walter

En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°585

Légende photo : Céline Portes et Vincent Roche-Lecca

Crédit photo : D. R.

Le public de théâtre rajeunit mais la base de spectateurs se tasse

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barometre

Le baromètre Les Français et le théâtre de l’Association pour le soutien du théâtre privé (ASTP) met en évidence « un important rajeunissement des Français spectateurs de théâtre au cours des 12 derniers mois », avec un âge moyen de 40,5 ans (-5 ans par rapport à 2024) et, des publics qui se sont encore féminisés, à hauteur de 57 % désormais : soit « + 8 points par rapport à l’an dernier, et + 6 points par rapport à la proportion de femmes dans la population française ». La tendance observée depuis deux ans « semble désormais bien installé », ce qui rassure l’ASTP, car « elles sont très prescriptrices sur les pratiques culturelles et les loisirs. »

Tassement de la base de spectateurs
Ce rajeunissement repose sur la part importante que prennent les moins de 35 ans (47 %) parmi les spectateurs de théâtre alors qu’ils représentent 30 % de la population, à l’inverse des plus de 50 ans (47 % de la France entière) qui fournissent 33 % des publics de théâtre. Toutefois, avec 22 % des Français qui sont allés au théâtre au cours des 12 derniers mois, soit 11,3 millions de Français, la base se rétrécit par rapport à l’an dernier (-7 %), bien que le théâtre soit le deuxième type de spectacles le plus suivi après les concerts et les festivals de musique, ces derniers observant eux une nette croissance de leurs publics. En tout, 26,1 millions de Français ont déclaré être allés au spectacle pendant la période concernée, soit 51 % de la population.
De manière assez attendue, les CSP+ et les urbains, notamment Parisiens, sont toujours « très représentés » parmi les spectateurs de théâtre cette année, mais l’ASTP note que « leur présence s’érode, laissant entrevoir une possible évolution de fond de la composition des publics, à surveiller. »

Des comportements assidus
Le baromètre réalisé par Médiamétrie du 22 au 30 avril auprès de 1 541 individus en France entière âgés de 15 ans et plus, selon la méthode des quotas, relève une nouvelle fois la fidélité et l’assiduité des spectateurs de théâtre, avec 6,3 représentations vues au cours des 12 derniers mois, et même jusqu’à 7,8 pièces vues pour les moins de 35 ans. 
Selon les déclarations des spectateurs, 25 % estiment que leur pratique s’est « intensifiée » cette année, avec là aussi une tendance plus forte chez les moins de 35 ans (30 % disent y être allés plus). 

Le prix est toujours un enjeu
Les 20 % de ceux qui vont le moins au théâtre évoquent le prix des places (32 %), la perte d’habitude (22 %) et le manque de temps (21 %) comme prétexte. Malgré tout, ce type de spectacle reste une sortie attrayante, car 61 % des Français aimeraient y aller plus souvent. Pour les Français c’est une sortie « désirable » à l’image toujours positive, bien qu’elle paraisse trop chère (69 % des Français). Mais en deux ans, se réjouit l’ASTP, le « consentement à payer une place » s’établit désormais dans une fourchette de 31 à 54 euros (contre 26 à 47 euros en 2023).

Jérôme Vallette

En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°585

Crédit photo : D. R.
 

Fabrice Roux : « Je souhaite des aides plus importantes pour les indépendants »

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Fabrice Roux

Fabrice Roux, directeur-gérant de L’Archipel (cinéma et salle de musiques actuelles et de théâtre), à Paris, président de la société de production Happyprod, vient d’être réélu pour 3 ans à la tête de La Scène indépendante, qui représente des entrepreneurs de spectacles. Fervent défenseur d’aides spécifiques pour les plus petits indépendants, l’activation des aides à l’emploi dès 1 artiste sur scène, il évoque aussi la nouvelle gouvernance de l’ASTP dont le conseil d’administration du 11 juin (après notre bouclage) devait désigner les représentants du conseil professionnel et élire de la présidence de l’association.

Vous avez signé un communiqué avec Ekhoscènes saluant la réforme de l’Association pour le soutien du théâtre privé (ASTP) alors que vous avez été très critique pendant le processus.
Nous avons atterri sur quelque chose qui nous convient. Auparavant, il y avait trop peu de bénéficiaires et des inégalités de traitement. J’ai appelé de mes vœux une modification, et pas que de la gouvernance. L’inspection générale des affaires culturelles (IGAC), dont nous avions demandé le rapport, a rendu ses conclusions. C’est un système qui ne prenait pas en compte les évolutions naturelles que le métier avait vues. Il y avait des dysfonctionnements. Il fallait redistribuer les cartes. La direction d’Ekhoscènes a participé à faire évoluer les choses. 

Vous êtes donc satisfait de la nouvelle architecture de gouvernance ?
Oui. En bonne intelligence, nous avons réussi à la changer. Nous représentons 10 % du conseil d’administration de l’ASTP, et Ekhoscènes 90 %. Aujourd’hui, nous sommes dans un autre rapport, avec la montée en puissance de l’État et de la Ville de paris, et l’entrée des salariés, des organismes de gestion collective. Les relations avec Ekhoscènes se sont apaisées. Désormais, l’ASTP est plus ouverte, plus transparente. Ça s’annonce bien pour la suite. Nous allons tout faire pour accoucher de la réforme des aides.

Vous voulez des aides spécifiques pour les indépendants ?
Oui. Nous avons le droit de réclamer des aides spécifiques pour les indépendants — qui n’ont que leur banque et le droit de tirage pour eux. Je ne suis pas contre les groupes, je suis pour qu’on revoie l’organisation du partage des aides afin qu’il y ait des lignes budgétaires plus importantes pour les indépendants qui n’ont pas de filet de sécurité. 

Quand aboutira cette réforme des aides ?
On est bien parti pour faire voter les choses en décembre avec des dispositifs plus justes, avec l’accent sur l’aide à la diffusion, à l’emploi, à la création. Je suis aussi pour qu’il y ait une aide au déficit, mais seulement pour les entreprises, pas pour les projets. Là, l’ASTP est à la fois l’endroit où apaiser les choses et servir de laboratoire pour le futur. Car il faut s’élever un peu au-dessus de la mêlée pour regarder l’intérêt de la filière. Par exemple, il n’est pas normal que seule la ville de Paris contribue au financement de l’ASTP, les autres grandes villes doivent aussi le faire. Sur ce sujet du financement de l’ASTP, je reste sidéré qu’on n’ait pas encore déplafonné les recettes de la taxe [cette année le plafond est de 8,5 millions d’euros, NLDR]. On devrait d’ailleurs aussi déplafonner les recettes de la taxe qui financent le Centre national de la musique. On a fléché un impôt pour que nos filières se développent, il ne faut pas freiner ni limiter ce développement.

Et les crédits d’impôts ?
On peut se satisfaire que cela ait été remis dans le budget cette année. Mais ça me gêne que des esthétiques comme la danse ne puissent y émarger. Je me battrai pour ça. Et ce qui ne fonctionne pas non plus, ce sont les inégalités de traitement entre la musique et l’humour (crédit d’impôt dès un artiste sur scène) et le théâtre (où il faut être 6 sur scène au moins). Il n’y a aucune raison à cela. Aujourd’hui, tout le monde fait tout, on n’a pas vraiment de raison d’entretenir des différences de traitement entre différentes esthétiques : nous voulons l’égalité de traitement. Pourquoi cela existe-t-il pour l’humour et la musique et pas pour le théâtre ?

Le Centre national de la musique a un nouveau président…
Je suis très heureux des rendez-vous que j’ai eus avec Jean-Baptiste Jourdain [nouveau président, NDLR] qui connaît très bien le secteur. Nous avons de notre côté un discours franc et direct : le rabiotage sur le droit de tirage, cela ne me convient pas. On a touché à ça et on a un peu l’impression qu’on est devenu une variable d’ajustement. Je ne désespère pas de le faire revenir là-dessus. Il ne faut pas toucher au 65 % [jusque-là, le produit de la taxe billetterie du CNM était reversé aux producteurs de live à 65 % et les 35 % restants répartis à toute la filière via les aides sélectives. Ce droit de tirage est passé à 60 %, soit 2,7 millions d’euros en moins]. J’ai des adhérents qui ont besoin de ces droits de tirage, car ils font énormément de développement d’artistes. Ceux qui investissent en plus sur l’émergence, il faut les accompagner. Et sans doute faut-il accompagner davantage les indépendants que les groupes, car ce sont souvent des découvreurs de talents. Concernant les aides sélectives, je pense que le nouveau règlement élaboré est très compliqué. Il faut le simplifier. On doit pouvoir organiser des aides triennales. On connaît les producteurs, certains déposent 30 demandes d’aides. Il faut faire des canaux directs, aller plus vite, plutôt que de redemander à chaque fois les mêmes pièces, etc. 

Votre syndicat représente aussi des producteurs d’humour ?
Oui, cela me tient très à cœur — nous avons 103 producteurs d’humour. Je suis pour qu’on crée une commission création-diffusion particulière pour l’humour avec des producteurs qui savent de quoi ils parlent. C’est un genre en permanence en croissance, et il faut créer les conditions pour que les producteurs se rejoignent. Nous avons créé les Augustes de l’humour à Lille, un énorme succès, et cette manifestation a vocation a être diffusée sur France Télévisions. À partir de 2026, j’aimerais qu’on crée un marché professionnel (stands, showcases) sur 2-3 jours autour de cette manifestation. 

Et le Fonpeps ?
On continue de vouloir que dispositif de soutien à l’emploi du plateau artistique de spectacles vivants diffusés dans des salles de petites jauges (APAJ) soit applicable, dès une personne sur scène et non de 3 personnes comme actuellement. Car nous sommes dans de petites salles. A Avignon, je crois que 900 spectacles ont moins de 3 artistes sur scène. Dans les chiffres, c’est l’aide à l’embauche en CDI ou en CDD dans le secteur du spectacle (AESP) qui mangeait beaucoup des crédits du Fonpeps, avec des postes administratifs qui sont devenus permanents. Or, le Fonpeps est d’abord une aide à l’emploi des artistes et techniciens. Une des solutions pourrait être de limiter l’APAJ aux jauges les plus petites, par exemple pour les salles de moins de 250 personnes (aujourd’hui moins de 500), dès un artiste sur scène. 

Propos recueillis par Jérôme Vallette

En partenariat avec La Lettre du spectacle n°584

Légende photo : Fabrice Roux

Crédit photo : Alexandre Dinaut

Des élus demandent un moratoire, le gouvernement crée un groupe de travail

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Sleaford Mods

Des parlementaires et maires de grandes villes viennent d’écrire aux ministres de la Santé, de la Transition écologique et de la Culture pour demander un moratoire sur le décret « son » qui vise à limiter les niveaux sonores des spectacles, notamment en plein air. « S’il est basé sur des ambitions vertueuses auxquelles nous souscrivons [ce décret] s’avère aller trop loin dans les restrictions sonores », assurent ces quinze grands élus. « Les valeurs limites stipulées rendent le décret inapplicable pour les spectacles et festivals en plein air ». Et les élus de reprendre les mots de la filière : « Cette réglementation fragilise donc gravement l’exercice même de certaines pratiques musicales, et menace plus largement la tenue de tout événement en extérieur sur l’ensemble du territoire que ce soit dans les grandes agglomérations ou les territoires ruraux. » Pour Ekhoscènes, ou encore le Syndicat de musiques actuelles, il devient d’autant plus urgent que la saison des festivals a débuté. 

Appuyer sur pause
Le moratoire, espèrent-ils, pourrait s’appliquer pour l’été, afin de trouver calmement des conditions d’amélioration du décret. Au Printemps de Bourges, Rachida Dati avait annoncé qu’« une nouvelle étape importante sera franchie à la fin du mois d’avril [avec la réunion] des ministères concernés pour s’accorder sur un assouplissement de la réglementation, en particulier sur les niveaux d’émergence ». 
Dans leur courrier, les élus rappellent tout le travail de la filière déjà réalisé en vue de la future application de la loi en 2023. Ainsi, l’association Agi-Son a patiemment testé l’application technique du décret, sur le terrain, avec une expérimentation de grande ampleur lors du festival Marsatac (Marseille).  Mais les résultats constatés montrent « l’inapplicabilité du décret et de son arrêté, malgré la mise en œuvre de nombreuses mesures préventives techniques ». 
En réponse, le gouvernement  vient d’annoncer la création d’un « groupe de travail technique avec les professionnels concernés », placé sous l’égide du ministère de la Culture, et chargé « d’identifier d’ici le 31 octobre prochain des propositions alternatives » afin de trouver des dispositions « techniquement plus facilement applicables. »  

Jérôme Vallette 

En partenariat avec La Lettre du spectacle n°584

Légende photo :  Sleaford Mods au festival Levitation 2024 (Angers)

Crédit photo : Eric Deguin

Conventionnements : les critères DRAC étranglent les compagnies artistiques

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Sea Of Silence

Désormais loin des réalités, ces critères d’aides au projet ou au conventionnement conduisent des équipes à renoncer à leurs demandes.

C’est la suite logique de l’alerte lancée par LAPAS, l’Association des professionnel·le·s de l’administration du spectacle, à l’été 2024 : la diffusion s’effondre. Cette année, ce sont les experts DRAC qui sonnent l’alarme sur des critères d’éligibilité aux aides au projet ou au conventionnement « hors sol » par rapport à la réalité : soit la baisse moyenne de la diffusion de 33 % entre les saisons 2023/2024 et 2024/2025. LAPAS a rebondi et présenté une tribune (La Lettre du Spectacle, le 20 mai), signée par l’ensemble de la filière et de très nombreux experts DRAC.
Pour la majorité des compagnies, il est impossible de répondre à ces prérequis, modifiés en 2022, pour déposer une demande de conventionnement en DRAC : 25 représentations sur 2 ans et 70 sur 3 ans pour la danse, 20 représentations sur 2 ans et 70 sur 3 ans pour la musique ou encore 50 représentations sur 2 ans et 90 sur 3 ans pour le théâtre dans deux régions au minimum, 80 représentations pour le cirque, les arts de la rue et les DOM. 
Conséquence ? LAPAS relève déjà une chute de 22 % des demandes théâtre et arts associés en Île-de-France. « Nous assistons de façon accélérée à l’immense précarisation des artistes et techniciens », résume Véronique Felenbok, sa présidente.

Un mouvement se lève
« On a rejoint ce mouvement assez facilement, car cela met des mots sur ce qu’on vit tous, témoigne Vincent Roche Lecca, nouveau coprésident de Scène Ensemble. Il y a une forme d’unanimité, on est très nombreux à être membre des commissions DRAC. » Mais le directeur de la Scène nationale de Bourg-en-Bresse précise que cette tribune « n’est pas une attaque en règle des DRAC, car on voit les conseillers tordre les critères pour faire rentrer les dossiers ». Lui demande « d’arrêter la machine deux secondes pour réfléchir : certains poussent pour une reconnaissance du volume d’emploi, d’autres pour une piste plus mécanique de baisse des seuils. » Même son de cloche au Synavi (lire page 4), dont la directrice assure avoir prévenu la direction générale de la création artistique (DGCA) dès février, et « demandé officiellement un assouplissement des seuils », détaille Claire Moreau. Une circulaire aux DRAC avait été envisagée, dit-elle, mais n’est pas venue. Par ailleurs, son syndicat demande d’intégrer « les lieux de diffusion non dédiés » dans les critères, avec une réalité : « Partout où on joue, il y a du public », et un slogan : « Une date vaut une date ».

Une réunion le 1er juillet
Pour la trésorière du Syndeac, et chorégraphe, Mélanie Perrier (Compagnie 2 minimum), il devait pourtant y avoir des dérogations : « Dans les faits, c’est une exception et non plus la règle ». De plus, elles ne sont pas homogènes sur le territoire. Son syndicat qui a obtenu un rendez-vous avec le DGCA, Christopher Miles, le 1er juillet, a décidé de « l’élargir aux organisations représentant des équipes artistiques : Scène Ensemble et le Synavi ». Elle est d’autant plus inquiète que les DRAC « respectent de moins en moins l’avis des comités d’experts » et qu’« on demande aux compagnies des copies des coproductions à échelle de trois ou quatre ans » alors que les calendriers ont « rétrécis ». 
Et les productions sont ralenties par l’inertie administrative, que ce soit le vote tardif des budgets des collectivités ou l’instruction des demandes (plus de 10 mois). « C’est un effet de domino qui conduit à une hécatombe », cingle Mélanie Perrier. « On pourrait attendre de l’État, qui a une vision panoptique, qu’il soit en capacité d’inventer un système au plus près des besoins et des exigences ».

Jérôme Vallette

En partenariat avec La Lettre du spectacle n°584

Légende photo : Sea Of Silence, de Tamara Cubas

Crédit photo : Eric Deguin

Festivals en crise : des pistes pour avancer

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Au Festival de Marseille

Inflation, réglementation, concurrence, baisse des aides publiques, aléas naturels… Les festivals sont pris en étau entre plusieurs difficultés. Quelques alternatives sont envisageables.

L’augmentation des cachets artistiques est une antienne connue, notamment dans le secteur des musiques actuelles. Les festivals en seraient les responsables et les victimes, les têtes d’affiche profitant des événements estivaux pour demander des cachets toujours plus importants. Le phénomène s’est accru depuis quelques années avec des tournées d’artistes anglo-saxons passant par des stades et arenas l’été et non plus en festivals, qui n’en ont plus les moyens. Selon Malika Séguineau, directrice générale du syndicat Ekhoscènes, « beaucoup d’artistes préfèrent avoir leur seul public, et ce dernier veut voir son artiste favori avec sa communauté dans un lieu dédié pour un concert dans son intégralité. Nous le regrettons, mais c’est à nous de réinterroger l’objet festival ».

Plusieurs événements ont fait le choix de se passer des têtes d’affiche, comme les Suds à Arles, dont le directeur, Stéphane Krasniewski, est aussi président du Syndicat des musiques actuelles. Il analyse : « Face à cette inflation des coûts artistiques, soit les festivals relèvent le prix du billet – mais ils tentent de rester accessibles – soit ils augmentent leur jauge, ce qui n’est pas dans l’air du temps. Certains ont décidé de réduire leur nombre de jours, de devenir biennaux ou de se diversifier dans des activités à l’année. » Les concerts des têtes d’affiche sont de plus en plus gourmands en moyens techniques. Les festivals ne peuvent les accueillir dans les mêmes conditions que des stades. Une réflexion doit être menée entre organisateurs, producteurs, artistes et public. L’expérience festivalière est tenue de se démarquer de celle d’un stade.

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Lire la suite dans La Scène n°117 - Juin 2025

Par Nicolas Dambre

Légende photo : Au Festival de Marseille, la direction multiplie les projets avec les habitants pour s’ancrer sur le territoire.

Crédit photo : Pierre Gondar

Comment monter une tournée en Asie

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La Maison en petits cubes

Partir en tournée dans les pays asiatiques est particulièrement motivant pour les compagnies, mais cela nécessite anticipation et méthode.

L’Asie est un territoire porteur pour les compagnies françaises à l’export. Les diffuseurs programment généralement les spectacles selon le principe de séries, et les théâtres, très bien équipés, offrent un cadre enviable. Pour s’y produire, des dispositifs institutionnels existent, la saison culturelle franco-chinoise Croisements étant la principale vitrine de cette diplomatie culturelle. Des compagnies établissent leur tournée en dehors de ces cadres, à partir d’une invitation faite par un festival ; souvent après avoir été repérées par des professionnels, nombreux à venir en Europe sur différents festivals et conventions. « En tant que productrice et directrice, mon travail consiste notamment à voyager dans le monde entier pour découvrir des spectacles et monter des collaborations internationales avec la Chine », remarque ainsi Forrina Chen, fondatrice du théâtre Art Space for Kids, à Shanghaï.

Si ce n’est pas à proprement parler le parcours du combattant avant de fouler les plateaux à l’autre bout du monde, se lancer dans l’aventure sans l’appui d’une institution du type Institut français ou ambassade de France nécessite sang-froid, méthodologie et anticipation. Le choix du spectacle que l’on souhaite présenter en Asie doit lui-même être bien réfléchi. « En 2011, nous avons créé La Maison en petits cubes, d’après un animé japonais de Kunyo Katô et Kenya Hirata. Nous avions évoqué le “rêve” de le jouer au Japon, d’autant plus que nous nous sommes aperçus qu’il y avait une demande importante de spectacles de marionnettes en Asie », explique Samuel d’Aboville, chargé de production de la compagnie Spectabilis, qui a déjà effectué des tournées en Corée du Sud et au Japon, et qui était en Chine en ce printemps. 

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Lire la suite dans La Scène n°117 - Juin 2025

Par Tiphaine Le Roy

Légende photo : Pour La Maison en petits cubes, la compagnie Spectabilis a investi 4 000 euros afin d’être équipée pour voyager régulièrement en Asie.

Crédit photo : Cédric Lotterie