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Publics : comment faire venir les ados ?

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la Bande du futur

Ils sont sans aucun doute, avec les jeunes actifs, parmi les publics les plus difficiles à mobiliser.

Si les jeunes spectateurs fréquentent en nombre les institutions culturelles, dans le cadre scolaire mais aussi dans des séances familiales largement démocratisées, la période adolescente est souvent celle où l’on « perd » ces publics, hors du cadre scolaire. À La Garance, scène nationale de Cavaillon (Vaucluse), le sujet est au travail depuis bientôt une dizaine d’années. Si la cible première reste le public solaire, et celui qui se déplace avec les relais sociaux d’accompagnement à la scolarité, « les jeunes » en général font l’objet d’une attention particulière. Un « groupe jeunes » a d’abord été créé, comme le rappelle Nicolas Glayzon, responsable des relations avec les publics, qui a veillé d’emblée « à ce qu’il reflète une vraie diversité et n’accueille pas uniquement des enfants issus de familles qui viennent au théâtre ».

Ici aussi, les relais sociaux et les enseignants ont été sollicités dans la mise en relation avec le théâtre. Ce groupe jeunes a d’abord bénéficié d’un parcours de spectacles, de quelques ateliers de pratique et de temps d’échange, jusqu’à ce qu’un jour, il demande à créer lui-même un spectacle. Ce désir croise celui de l’une des artistes associées de la scène nationale, Marie Levavasseur, qui « rêvait » de porter des adolescents au plateau. C’est ainsi que naîtra Et demain le ciel, projet coécrit et joué par les adolescents du groupe jeunes. Ce projet, unique, n’a pas été renouvelé, mais le groupe jeunes demeure.

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Par Cyrille Planson

Légende photo : A La Garance, la Bande du futur a la possibilité de choisir et de programmer un spectacle.

Crédit photo : D. R.

Peut-on (encore) sanctuariser la culture ?

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Aymeric Seassau

À rebours de nombreuses collectivités, la Bretagne, la Seine-Saint-Denis et la Ville de Nantes ont maintenu, voire renforcé, leur soutien à la culture. Mais disposent-elles encore d’une réelle marge de manœuvre ?

Le 12 décembre 2024, sans connaître encore l’ampleur de l’effort budgétaire à venir, la Région Bretagne adopte un budget primitif sanctuarisant la culture, les langues et le sport. « C’est un choix politique fort que le président de la Région a pris très vite avec le soutien de tous les élus », souligne Gaëlle Le Stradic (Bretagne sociale, démocrate et écologiste), vice-présidente chargée de la culture. Pour maintenir le montant alloué à la culture (28 millions d’euros hors patrimoine), la Région a dû tailler ailleurs, reportant ou supprimant certaines actions. Mais, même si la région a élagué son budget de 43 millions d’euros, le message est clair : « En Bretagne, la culture n’est pas une variable d’ajustement. »

Dans un contexte « d’asphyxie financière », marqué par un désengagement progressif de l’État et une sous- compensation des charges transférées (estimée à 434 millions d’euros pour l’année 2025), la Seine-Saint-Denis affiche un soutien constant à la culture. Stéphane Troussel (socialiste), président du Département, revendique « un budget de combat », rendu possible grâce à « une maîtrise rigoureuse des dépenses », permettant d’augmenter l’emprunt. Le budget passe de 18,8 millions d’euros en 2021 à 20 millions d’euros en 2025. Cette hausse, « bien que modeste en apparence », témoigne d’un « effort remarquable », au moment où les finances des départements dévissent. Autre particularité notable : 95 % des crédits (dont 80 % en subventions de fonctionnement) sont alloués sous forme de subventions directes aux acteurs du territoire.

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Par Arzelle Caron

Légende photo : Aymeric Seassau, adjoint à la maire de Nantes, délégué à la culture

Crédit photo : Michael Meniane

Festivals : limiter son impact sur les riverains

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Aux Tombées de la nuit

Plusieurs solutions sont mises en avant par les organisateurs de festivals pour remédier à la gêne occasionnée dans le voisinage immédiat.

En investissant des sites non dédiés, souvent en plein air, les festivals risquent de perturber le quotidien des riverains et leur tranquillité. Des nuisances de différentes natures, liées à la dimension de l’événement, au nombre de spectateurs accueillis, aux horaires parfois tardifs des spectacles, ont ainsi été identifiées. Inciter aux mobilités douces La première problématique concerne la circulation aux abords du ou des lieux du festival lors de l’arrivée puis du départ des publics. Afin d’éviter la formation d’embouteillages, la solution la plus usitée est d’inciter les festivaliers à recourir aux mobilités douces (venir à pied, en transports en commun, à vélo) et de bannir (hormis pour les personnes en situation de handicap et certains partenaires) les parkings.

Installé dans le parc Borély à Marseille, Marsatac a travaillé avec les collectivités territoriales, notamment la métropole, pour mettre en place des navettes dédiées et une extension des lignes de bus jusqu’à Aubagne et Aix-en-Provence. Les publics empruntant des TER peuvent ainsi déposer leur véhicule à la gare, puis poursuivre leur parcours à pied. « Nous avons, en outre, aménagé, dans les allées du parc, des places de parking pour les vélos et les trottinettes », précise la directrice de Marsatac, Béatrice Desgranges. De telles démarches sont également facilitées par la politique volontariste de certaines villes, comme à Rennes, où l’usage du vélo en centre-ville est devenu la règle, ce dont profitent Les Tombées de la nuit, qui se déploient sur une quinzaine de sites. We Love Green (Paris) bénéficie, lui aussi, d’une situation géographique favorable, à une quinzaine de minutes à pied de stations de RER et de métro. 

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Par Marie-Agnès Joubert

Légende photo : Aux Tombées de la nuit, à Rennes, les spectacles en plein air doivent s’achever à 23 heures.

Crédit photo : Benjamin Le Bellec

Lieux : comment résister aux baisses de budget ?

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Florence Faivre

Des budgets culturels en provenance des collectivités territoriales ou de l’État rabotés partout, quand ils ne sont pas décimés. Comment les lieux font-ils face à cela tout en conservant au maximum leur fameuse « marge artistique » ? Panorama des options.

Avec une marge artistique de plus en plus congrue, de nombreux directeurs ont annoncé ces dernières semaines ne pas demander un renouvellement à la tête du CDN qu’ils dirigent (Jean Bellorini, Galin Stoev), voire s’échappent du théâtre avant la fin de leur mandant (Wajdi Mouawad à La Colline) ; des metteurs en scène font entendre une petite voix demandant pourquoi ce sont les équipes artistiques qui trinquent et moins le fonctionnement interne des lieux (lire page suivante). Ces derniers sont pourtant soumis à des changements pour s’adapter à ces moyens financiers évaporés et préserver autant que possible la création artistique.

La com' en première ligne
C’est le cas par exemple dans deux scènes nationales des Pays de la Loire, les Quinconces – L’Espal au Mans et le Grand R à la Roche-sur-Yon, qui ont perdu en 2025 l’intégralité des – respectivement – 100 000 euros et 124 000 euros qu’elles avaient reçus de la région en 2024. Et le pourcentage que cela représente par rapport à leur budget global (moins de 10 %) est bien peu éclairant sur les conséquences très raides que cela entraîne. « On a agi sur l’ensemble du budget et pas que sur la marge artistique, précise Virginie Boccard, à la tête de la double salle sarthoise. Mais la communication a tout de suite été impactée. » Ce sont des affiches imprimées en moins, l’annulation des documents print concernant les expositions, la fin des achats d’encarts publicitaires dans la presse spécialisée et le non-renouvellement du contrat avec une attachée de presse extérieure. Même chose en Vendée, où les plaquettes ne seront plus envoyées aux spectateurs. « Tout ce qui crée de la curiosité est fragilisé », note la directrice Florence Faivre. 

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Par Nadja Pobel

Légende photo : Florence Faivre, directrice du Grand R, à la Roche-sur-Yon

Crédit photo : David Fugere

Création : comment mieux pitcher son projet

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Florence Bisiaux

Les invitations faites aux artistes à pitcher leurs projets sont nombreuses. Elles nécessitent une préparation tant sur ce que l’on veut dire que sur ce que l’on en attend.

Complémentaires aux rendez-vous en tête à tête avec des producteurs et des diffuseurs, les rendez-vous de présentation publique de projets sont devenus incontournables pour les artistes. Souvent, ceux-ci participent à plusieurs temps de présentation pour chacun de leurs spectacles en cours de production ou de création. « Quand j’ai présenté Bonnes, à Mythos [début avril, à Rennes, en Ille-et-Vilaine, NDLR], j’en étais à la cinquième ou sixième présentation sur ce type de rendez-vous de présentation publique. Lors de ce pitch, le spectacle venait tout juste d’être créé et l’objectif était de travailler sa diffusion dans le cadre d’une série de représentations au Théâtre de la Tempête, en juin », raconte Louise Herrero, metteuse en scène de la compagnie La Mesa Feliz.

Présents aux rencontres professionnelles du Wet, organisées par le Théâtre Olympia, centre dramatique national de Tours (Indre-et-Loire), avec Artcena et Culture O centre, Julien Romelard et Chloé Bonifay pitchaient, fin mars, Quelle joie d’être un imbécile, spectacle qu’ils ont écrit et qu’ils mettent en scène avec leur compagnie, Hérétique théâtre. « Au total, nous avons fait quatre présentations de ce spectacle qui sera créé en novembre », indique Chloé Bonifay. « L’un comme l’autre, nous avons déjà une certaine expérience dans le secteur du théâtre. Mais notre compagnie, elle, est assez jeune. Ce sont des temps qui permettent de la faire connaître », ajoute Julien Romelard.

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Par Tiphaine Le Roy

Légende photo : Florence Bisiaux, lauréate du dispositif  C’est pour bientôt, lors de sa présentation devant le jury, à Lille.

Crédit photo : D.R.

Culture et ruralité : un an après

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La Caravane poétique

Douze mois après l’annonce du plan « Culture et ruralité » du ministère de la Culture, La Scène est retournée interroger celles et ceux qui avaient partagé leur analyse et leurs espoirs dans ses colonnes, au printemps 2024.

Voici presque un an, le 12 juillet 2024, la ministre de la Culture Rachida Dati lançait le plan « Culture et ruralité », décliné en 23 mesures qui faisaient suite à une courte concertation nationale. Pendant quelques mois, les acteurs culturels et les collectivités locales avaient été invités à contribuer au Printemps de la ruralité. « Il n’y a pas de fatalité à la déprise rurale, notait alors Rachida Dati. Services publics, commerce, offre culturelle : il faut une vision globale pour la redynamisation de nos territoires ruraux. Aujourd’hui, c’est même dans les campagnes que se réinvente un service public de la culture, qui change littéralement des vies. Cela doit tous nous inspirer. »

Le plan « Culture et ruralité » était doté de 98 millions d’euros sur trois ans (2024-2027), dont 18 millions d’euros alloués dès 2024. En réalité, 20,5 millions d’euros ont déjà été dépensés en 2024, sur 19 des 23 mesures du plan, selon les services de la délégation générale à la transmission, aux territoires et à la démocratie culturelle (DG2TDC) du ministère de la Culture. Fin mai dernier, devant la commission des finances de l’Assemblée nationale, la ministre confirmait que plus de 20 millions d’euros étaient « sanctuarisés pour 2025 et 2026 », précisant en quelques chiffres les endroits d’intervention majoritaires : la mesure Villages en fête, avec 133 projets soutenus ; l’aide aux radios locales (282 projets) ; le déploiement des artothèques (4 millions d’euros, dont 3 millions d’achats d’œuvres) ; 163 projets de résidence d’artistes dans 78 départements, 147 communes ; 4 millions d’euros pour les musées ruraux… « Le plan continue de se déployer et on a un début de rééquilibrage de l’accès à la culture », assurait la ministre.

Pour les festivals ruraux, 600 000 euros ont été dégagés pour 2025. C’est peu si l’on divise la somme par les 14 régions concernées. « On peut finalement soutenir deux festivals dans chaque région, à hauteur de 20 000 euros. Les attentes sont énormes mais un plan pour la ruralité, c’est forcément compliqué et coûteux tant les territoires sont vastes », nous dit-on en off. Dès 2024, le GIP Café Culture s’est trouvé renforcé pour les projets développés dans les petites communes, là aussi à hauteur de 600 000 euros. Et des moyens importants ont été fléchés pour que de grands opérateurs nationaux (Opéra de Paris, Ensemble intercontemporain, Centre national de la danse) puissent se déployer en milieu rural.

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Par Cyrille Planson

Légende photo : La Caravane poétique est un projet de la compagnie La Serendipe, tourné dans les villages des Hautes-Alpes par La Chouette, dans le cadre du festival Itinéraires Bis, en septembre dernier. 

Crédit photo : D.R.

Pass Culture : une reprise en main qui ne rassure pas

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Aurélie Hannedouche

Critiqué avec un tact prudent par Rachida Dati dès son entrée en fonction au ministère de la Culture, éreinté par des rapports successifs, le pass Culture, ce « totem présidentiel », connaît d’importants soubresauts. Gel brutal de la part collective fin janvier, important coup de rabot sur la part individuelle et nomination d’une nouvelle directrice en février, transformation de la structure en opérateur d’État programmée pour janvier 2026… Le débat, lui, reste ouvert.

« En l’état, le pass Culture n’est pas suffisamment démocratique. Sous certains aspects, il peut même alimenter la reproduction sociale. » Devant les sénateurs le 30 janvier dernier, Rachida Dati reprend à son compte certaines des critiques formulées dans le rapport de la Cour des comptes de décembre 2024 comme dans celui de l’Inspection générale des affaires culturelles (IGAC), rendu six mois plus tôt. La ministre de la Culture, tout en défendant le dispositif – « totem présidentiel », selon le mot de Laurent Lafon, président de la commission culture au Sénat –, s’est rapidement montrée critique à son égard et, au fond, ces deux enquêtes approfondies lui offrent des arguments pour le corriger. Pour mener à bien ce travail, elle a nommé le 14 février Laurence Tison-Vuillaume en lieu et place de Sébastien Cavalier à la présidence de la SAS Pass Culture.

La haute fonctionnaire, ex-directrice de cabinet de Françoise Nyssen lors de son passage Rue de Valois, a supervisé le rapport sur le pass lorsqu’elle était directrice de l’IGAC. C’est dire si elle en connaît intimement les limites qu’elle a elle-même pointées du doigt. Sa nomination symbolise la reprise en main par le ministère, suivant une préconisation de la Cour des comptes. Au 1er janvier 2026, le pass Culture sera un opérateur du ministère de la Culture – ce qui n’exclut pas son maintien sous la forme d’une SAS. Sébastien Cavalier refusait totalement cette perspective. Cette « réintégration au sein des services du ministère ne lui permettrait plus d’accomplir ses missions avec succès et hypothéquerait l’avenir du dispositif », écrivait-il en réplique aux magistrats de la cour.

La ministre a également repris la main sur le comité stratégique, l’organe qui décide des orientations du pass, dont elle a accusé les membres de « se faire plaisir » et de cultiver l’entre-soi. Quatre nominations ont déjà été actées, avec notamment un changement de président. Aymée Rogé, DRAC de Bourgogne-Franche-Comté prend la direction du comité. 

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Par Bruno Walter

Légende photo : Aurélie Hannedouche, directrice du SMA

Crédit photo : Julien Pebrel

« Le pass Culture est un outil, pas une politique publique stratégique»

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Marie-Christine Bordeaux

L’universitaire Marie-Christine Bordeaux, professeure à l’université Grenoble Alpes, revient sur les directions, souvent contestées, données aux politiques d’éducation artistique et culturelle.

La Scène : On a annoncé au printemps la suppression à venir du Haut Conseil de l’éducation artistique et culturelle (HCEAC), dont vous étiez membre. Qu’en est-il aujourd’hui ? 
La suppression du Haut Conseil de l’éducation artistique et culturelle a été votée par le Sénat dans un projet de loi déposé auprès de l’Assemblée nationale, nous sommes sans nouvelles de l’aboutissement de ce projet de loi, mais il est probable qu’il sera supprimé malgré la lettre ouverte que nous avons publiée avec Robin Renucci et Bernard Noly, également membres du Haut Conseil, pour demander son maintien et la mobilisation de réseaux d’acteurs.

La Scène : La création d’un poste de délégué interministériel à l’EAC, dévolu à Emmanuel Ethis, l’ancien président du HCEAC, est-elle une bonne nouvelle ? 
C’est un signe intéressant, car il montre que l’on cherche des solutions institutionnelles pour organiser l’interministérialité, qui est l’éternel problème de l’EAC. Simplement, cela ne règle pas l’autre dimension, très importante, qu’est le dialogue avec les collectivités territoriales. Le HCEAC y avait apporté une réponse en intégrant, pour un tiers de ses membres, des représentants des collectivités. Mais comme cette annonce est contemporaine de celle de la suppression du HCEAC, on ne peut que s’interroger sur la stratégie du gouvernement.

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Propos recueillis par Cyrille Planson

Légende photo : Marie-Christine Bordeaux

Crédit photo : Julien Pebrel

Les musiques actuelles comptent déjà les dégâts des baisses de subventions

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Gaëtan Roussel

Exemples à l’appui, le SMA alerte sur « un phénomène insidieux de déconstruction ».

Dans un tableau documenté, le Syndicat des musiques actuelles (600 adhérents) a recensé, série en cours, près de 70 millions d’euros en moins de contributions régionales à la culture et des dégâts déjà visibles pour ces esthétiques musicales, à tous les niveaux.

Le symbole de Bourges
Comme une incarnation de l’hécatombe, le Printemps de Bourges, qui ouvre la saison, a dû mener, pour la première fois en 10 ans, sa 49e édition avec près de 400 000 euros en moins sur un budget 7,5 millions d’euros (2024) : dans le détail, c’est 150 000 euros de sponsoring et surtout « 250 000 euros d'aides publiques » qui disparaissent, a expliqué peu avant l’ouverture du festival son directeur, Boris Vedel. Si l’État et la Ville ont maintenu leur soutien, ceux de la région Centre-Val de Loire et du département du Cher s’effondrent. Un autre symbole : ce sont les strates de collectivités les plus en retrait cette année. Ce qui a entraîné une « décroissance contrainte » pour l’événement qui a dû réduire la voilure.

Un phénomène insidieux
Les conséquences des coupes budgétaires mesurées par le syndicat sont multiples : « annulation de dates, groupes déprogrammés, annulation d’actions culturelles envers des publics scolaires, en situation de handicap, mais aussi risques de licenciements des équipes ou hausse des tarifs d’accès pour les publics ». La Fédération des lieux de musiques actuelles (Fedelima), qui publie ses « chiffres clés 2023 » s’alarme d’« une multiplication de signaux particulièrement préoccupants ». 
« Nous sommes évidemment très inquiets, alerte le président du SMA, Stéphane Krasniewski, car on observe un phénomène insidieux de déconstruction, une réalité qu’on ne voit pas qui est à l’œuvre, à bas bruit – et qui ne doit pas faire oublier le drame que vivent les structures en Pays de la Loire, par exemple. » D’ailleurs, l’étude mesure les effets de ricochets nationaux de ce coup de canon régional : « Quand Christelle Morançais coupe ses subventions, nous voyons – au-delà des structures de son territoire – un producteur à Arles dont le chiffre d’affaires est à 30 % en Pays de la Loire être impacté. » 
La simultanéité de ces coupes politiques, choisies, ou budgétaires, subies, entraîne des répercussions en chaîne sur le territoire, mais aussi dans la filière, comme ces structures annulant des concerts et qui perdent ainsi leur éligibilité aux aides du Centre national de la musique (CNM). Sur le terrain, le SMA illustre la casse avec le Café Charbon Nevers, Smac de la Nièvre, obligée de retirer de sa grille 4 à 6 concerts, soit 8 à 12 groupes en moins, et 3 actions culturelles (200 à 600 collégiens touchés), ou la Smac de Belfort, la Poudrière, qui fait disparaître 6 dates (12 groupes) et un projet avec des maisons d’arrêt. Il y a aussi le Jardin Moderne, structure d’accompagnement de musiciens (Rennes) qui réduit ses actions culturelles et annule son Open Garden 2025, les Moissons du Rock (Reims) qui ne peuvent plus financer leurs navettes, ou Adone Productions (Paris) contraint d’annuler 11 représentations du spectacle jeune public Cordalinge, dans trois régions… L’étude veut montrer « que ces structures font un travail de structuration de la filière avec un effet à long terme, et que ce sont aussi des actions qui maillent les territoires et font du lien social », insiste Stéphane Krasniewski. Il souhaite dépasser les chiffres pour mettre en valeur le travail qualitatif de ses adhérents, des projets de temps long : « Si on les fragilise, cela va prendre beaucoup d’années pour les reconstruire. Car ce sont des projets partenariaux avec des structures sociales », elles aussi touchées.

Jérôme Vallette

En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°581

Légende photo : Gaëtan Roussel au W, Printemps de Bourges 2022

Crédit photo : Jean-Adrien Morandeau

Carnet : disparition de Jean-Paul Montanari

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Jean-Paul Montanari

Comme l’épilogue un peu triste d’une saga qui a tenu en haleine la danse, Jean-Paul Montanari est décédé le 25 avril, alors que ses successeurs à la tête de l’Agora de la danse/Montpellier Danse viennent d’être nommés, mais avant qu’ils prennent leurs fonctions. Il ne verra donc pas l’aboutissement d’une action menée depuis plus de quarante ans et qui a fait de la métropole l’une des capitales mondiales de la danse. 

Et ce n’était pas écrit d’avance. Il a fallu beaucoup de persistance et de volonté pour qu’un gamin en 1947 né à Boufarik (Algérie), devienne journaliste à Lyon, dans ce qui est alors un pôle essentiel de l’effervescence chorégraphique française des années 1970. Il y rencontre le chorégraphe Dominique Bagouet, qui lui-même vient de rencontrer un jeune maire d’une ville pas très en vue. George Frêche a lancé le centre chorégraphique national et va s’accorder à cette vision de la danse que Jean-Paul Montanari sert en prenant en charge à partir de 1983 le festival qui existe déjà. Vu comme une « statue du commandeur », volcanique et entier, le jeune homme donne à la manifestation une place non envisagée initialement. Tant et si bien qu’en 1992, à la mort de Bagouet, le festival prend son autonomie. 

En 1994, il frappe un coup majeur en invitant Béjart pour une édition qui bouleverse la ville et les certitudes. À partir de cette édition, le festival tend à éclipser le CCN, ce qui ne va pas sans tension. La loyauté de Jean-Paul Montanari est rarement soulignée. Elle est pourtant absolue. Aux artistes, à la danse, à Georges Frèche et à la ville… Ainsi va-t-il suivre la réhabilitation du couvent des Ursulines en Agora internationale de la danse, où s’installent le CCN en 1997, puis le festival en 2001. Cette fidélité ombrageuse explique les attachements qu’il a suscités et le communiqué inhabituellement sensible de la part d’un maire au décès d’une figure de sa commune. Quand Michaël Delafosse, maire de Montpellier, en réponse à la phrase de Jean-Paul Montanari – « Ne faire confiance qu’aux artistes, les seuls à savoir transfigurer l’horreur en beauté »  – écrit : « C’est cette promesse que je veux garder en moi alors que cette nouvelle me plonge dans une tristesse infinie », on peut le croire.  

Philippe Verrièle

En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°581

Légende photo : Jean-Paul Montanari

Crédit photo : D. R.