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Ils ont choisi la décroissance

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Eddy Pierres

Dans la course au gigantisme entre festivals, certains ont choisi de réduire leur format. Parfois pour des raisons davantage financières qu’environnementales.

Panoramas, Musicalarue, Pitchfork, Les 3 Éléphants… plusieurs festivals ont décidé de ne plus miser sur la croissance continue de leur fréquentation publique ou de leur budget. Ainsi, Musicalarue, dans les Landes, a réduit en 2022 sa jauge quotidienne de 20 000 à 15 000 spectateurs. Son président, François Garrain, livre : « Une jauge doit être en adéquation avec quatre paramètres : le projet artistique (format, disciplines…), les lieux (le village de Luxey), le modèle économique (nous gérons aussi une salle) et la programmation. Le charme de Musicalarue, c’est aussi une certaine intimité et la complicité des villageois. » Contrairement à un champ, l’espace urbain n’est pas extensible. Près de 38 000 spectateurs ont assisté aux trois jours de festival fin juillet, lequel parvient à l’équilibre financier, avec un budget réduit de 2,9 à 2,6 millions d’euros entre 2019 et 2022.

Vers d’autres publics 
Eddy Pierres, directeur du festival Panoramas, à Morlaix (Finistère), justifie son choix de décroître : « En 2022, nous avons perdu près de 200 000 euros. Les précédentes éditions étaient complètes avec 26 000 spectateurs, mais ne dégageaient que 10 000 euros de bénéfices… C’était le moment d’évoluer. Soit en devenant plus gros, avec un risque financier proportionnel, soit en réduisant la voilure. » 

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Lire la suite dans La Scène n°108 - Mars 2023

Par Nicolas Dambre

Légende photo : Eddy Pierres, directeur du festival Panoramas, à Morlaix (Finistère) 

Crédit photo : Eric Deguin

Consultants : les méthodes évoluent

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Pauline Quantin et Benoît Pinero

Facilitation, recherche-création, « encapacitation » des habitants : de nouvelles méthodes de travail se font jour sur les territoires.

Sous l’effet de l’évolution de la société, de l’attente des habitants et du personnel politique, le métier de consultant en politiques culturelles se transforme. De nouvelles méthodes d’enquête, plus participative, sont engagées et il n’est pas rare que des projets puissent inclure un volet de production/création. Ensemble, Pauline Quantin et Benoît Pinero ont fondé Ligere, sur une convergence d’idées dans leur façon de porter des missions sur les territoires. Ils s’investissent alors « sur des projets très inscrits dans la co-construction avec les acteurs », accompagnant des acteurs culturels divers (associations, collectivités, porteurs de projets…) pour des missions de concertation et de facilitation. Récemment, le duo a travaillé avec Themaa à l’organisation des rendez-vous du Commun, en faisant précéder les rencontres « d’une vaste enquête pour voir ce qui se passe en région, précise Pauline Quantin. L’objectif est vraiment de faire le lien entre le national et le local, puis de construire ensemble dans ce cadre une réflexion, avec en perspective des états généraux de la marionnette ». 

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Par Cyrille Planson

Légende photo : Pauline Quantin et Benoît Pinero, consultants (Ligere)

Crédit photo : D. R.

Collaborer avec des influenceurs

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Florie Tribouiller

Encore peu répandue dans le spectacle vivant, cette pratique possède nombre de vertus, dont celles de contribuer à la découvrabilité et d’allier communication et médiation. 

A la différence du secteur muséal et patrimonial qui fait appel à eux depuis plusieurs années, le spectacle vivant tarde à s’appuyer sur la présence d’influenceurs dans sa communication. Il faut bien avouer que le concept peut, de prime abord, déconcerter, voire agacer, certains lieux refusant que leur projet artistique soit assimilé à une marque dont on vanterait les mérites. C’est précisément cet a priori réducteur et négatif que l’agence de communication Kiblos a souhaité déconstruire, en lançant à l’automne 2022 Influen’Scène, qui réunit à ce jour dix structures partenaires (deux centres dramatiques nationaux, quatre scènes nationales, deux scènes conventionnées, un établissement public et un pôle national cirque). « Notre objectif, observe Mélanie Guitton, responsable de communication numérique chez Kiblos, est de permettre aux salles de faire rayonner leur activité sur les réseaux sociaux, et de toucher des jeunes là où ils se trouvent, c’est-à-dire dans la sphère numérique. » Si de nombreux lieux développent déjà des contenus sur le Web, la plupart éprouvent, en effet, des difficultés à s’adresser aux publics les plus connectés ; ceci, faute de maîtriser leur langage et leurs codes. 

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Lire la suite dans La Scène n°108 - Mars 2023

Par Marie-Agnès Joubert

Légende photo : Florie Tribouiller, chargée de communication au Moulin du Roc, scène nationale de Niort

Crédit photo : Jean-Michel Monin

Etat des lieux : les femmes encore minorisées

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Assises de l’égalité femmes-hommes

Quelques jours après le rapport accablant du Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes sur l’état du sexisme en France, le Centre national de la musique publiait un large état des lieux sur la présence des femmes dans le secteur musical, lors des secondes Assises de l’égalité femmes-hommes, le 9 février, à Marseille (Bouches-du-Rhône). Sans surprise, les artistes féminines ou groupes menés par une femme (l’interprète le plus visible) ne représentent que 17 % de la programmation des spectacles musicaux en 2019, les hommes près de deux tiers. Un chiffre qui varie du simple au double entre les plus petits lieux et les plus grandes jauges (16 % dans les scènes de musiques actuelles). Les femmes sont sous-représentées dans les musiques électroniques et le hip-hop ou comme solistes en opéra. Les inégalités salariales sont plus marquées pour les femmes en CDI qu’en CDD, en moyenne payées de 17 à 20 % de moins que les hommes dans le spectacle vivant public et privé, notamment dans les fonctions techniques.

Inégalités qui s’accentuent avec l’âge, alors que l’on constate une « évaporation » des femmes de l’emploi après 30 ans, sans doute pour maternité. Cette disparition est également constatée après les conservatoires, avec une faible professionnalisation des musiciennes. Les clichés ont la vie dure côté pratique, les cuivres seraient, par exemple, plus masculins, la harpe plus féminine. Et le sexisme est à l’œuvre dans des remarques sur une musicienne enceinte ou sur sa jolie robe, rapportait la pianiste Lola Rossignol, lors de débats. Sans s’inscrire dans le programme de parité Keychange, Jean-Paul Roland, directeur des Eurockéennes, relevait que les artistes féminines sont parfois programmées sur une petite scène à une heure tardive. Lola Frichet, bassiste metal, défendait son association More Women On Stage pour accentuer la visibilité, à l’instar d’autres initiatives comme Majeures, Demandez à Clara, Elles Women Composers ou Rappeuses en liberté. Réseaux et entraides seront nécessaires pour améliorer le prochain état des lieux du CNM.

Nicolas Dambre

En partenariat avec La Lettre du spectacle n°532

Légende photo : Lors des Assises de l’égalité femmes-hommes.

Crédit photo : Xavier Dartayre

L’avenir du conservatoire pose question au Cube

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Cube

C’est sous l’angle du numérique que Garges-lès-Gonesse (Val-d’Oise) envisage désormais la culture. En témoigne Le Cube, nouveau complexe mêlant théâtre, auditorium, salle d’exposition, médiathèque. Des moyens importants ont été injectés en co-maîtrise d’ouvrage par la communauté d’agglomération Roissy Pays de France et par la Ville désormais dirigée par l’UDI Benoît Jimenez. Un budget de « 24 millions d’euros a ici été investi en construction » selon Julie Ageron, directrice communication et relations avec les publics, qui précise que « ce montant est pourvu à hauteur de 90 % par la Mairie, la Communauté d’agglomération finançant la médiathèque intercommunale » tandis que le défunt centre de formation Le Cube apporte le reliquat.

« Par rapport à l’Espace Lino Ventura, nous avons plus que triplé la surface et atteignons 8 000 m2, remarque Florian Blache, directeur du spectacle vivant. Il y a deux jauges : la Scène avec 615 places assises et 2 000 debout, le Ring avec 250 places ». Un EPCC a vu le jour pour l’occasion. Mais des inquiétudes sur la petite vingtaine d’enseignants du conservatoire, dont le bâtiment du 14, rue Philibert Delorme a été vendu à un collectif de médecins, émergent. « Les enseignants théâtre, art plastique et danse ont été remplacés par des associations locales, décrit Karine Huet, secrétaire générale adjointe du SNAM-CGT. Quel service public de la culture ? Et je ne parle pas du respect de la réglementation pour les changements de contrats des enseignants du public en privé ».

Nicolas Mollé

En partenariat avec La Lettre du spectacle n°532

Légende photo : Le numérique constitue le fil rouge du Cube. 

Crédit photo : Mathieu Delmestre

Ballet : Kader Belarbi fait les frais du changement d’ère

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Kader Belarbi

Le 12 février, Toulouse Métropole a annoncé le licenciement du directeur du ballet du Théâtre du Capitole, Kader Belarbi. L’étoile de l’Opéra de Paris, 60 ans, dirigeait la compagnie depuis août 2012. La collectivité fait état d’« une enquête administrative interne menée au sein du ballet du Capitole » et de « défaillances managériales ». Pourtant, les témoins qui, le 10 février, ont assisté à la générale du spectacle Malandain-Carlson donnée par le Ballet sous la direction de celui qui en était encore directeur, n’ont remarqué aucun signe, ni de la part de Kader Belarbi, ni des danseurs. Un signalement a été effectué par un danseur auprès du procureur de la République de Toulouse pour des faits qui s’apparenteraient à du « harcèlement moral » mais que conteste formellement le directeur (une plainte est déposée pour dénonciation calomnieuse) et le turn-over (15 danseurs sur 35 en deux ans) est présenté comme un argument attestant de ces faits.

Belarbi avait pour le Ballet du Capitole les ambitions d’un « ballet classique » à l’ancienne, mais peu de moyens, du moins pas ceux pour engager des stars ou débaucher des danseurs de grandes compagnies. Le choix a donc été de prendre des risques en engageant des danseurs encore très jeunes, ou bien, venant d’autres cultures et d’autres formations (kazakhs, pays de l’Est, coréens...). Le chiffre du turn-over amalgame aussi les départs en retraite et effectivement certaines ruptures, parfois conflictuelles. Ce qui pondère beaucoup cet argument du « turn-over » comme preuve des dites « défaillances ». La seule personnalité à avoir pris la parole, notamment sur France Info, pour justifier la décision, Yves Sapir, est délégué CGT au sein du Théâtre du Capitole (membre de la commission paritaire qui a pris la décision à l’encontre de Kader Belarbi), évoquant l’enquête interne plus que le signalement au procureur comme fondement du licenciement : « Et ce qu’il se passe avec M.Belarbi, c’est un signal en direction de toutes les personnes qui ont cette vision complètement archaïque de ce qu’est la pratique des arts, qui montre qu’aujourd’hui, c’est fini. » Il se pourrait aussi qu’à l’occasion du changement de tutelle le départ forcé d’un directeur de ballet avec lequel des désaccords persistaient arrive opportunément. 

Philippe Verrièle

En partenariat avec La Lettre du spectacle n°532

Légende photo : Kader Belarbi

Crédit photo : D. R.

Le festival Radio France se recentre

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Michel Orier

La nomination de Michel Orier à la direction du Festival Radio France Occitanie Montpellier signe une évolution de la manifestation presque quadragénaire. Montpellier et son agglomération redeviendront le centre du festival, alors que depuis 2017 ce dernier rayonnait sur les 13 départements de la région Occitanie. « Une superficie équivalente à celle de l’Autriche, ce qui compliquait l’organisation du festival. Il était impossible de travailler en amont ou en aval d’une représentation. Comme dans le théâtre classique, un festival, c’est une unité de temps, de lieu et d’action », livre Michel Orier. Financièrement, la Ville et la Métropole de Montpellier deviendront les premiers partenaires de l’événement. De 2022 à 2023, leur part passera de moins de 500 000 à plus de 800 000 €, celle de la Région de 1,6 M€ à 1,3 M€, pour un budget en hausse, à 2,6 M€. Radio France ne finance pas mais apporte la programmation, ses quatre formations permanentes ou les antennes de France Musique et de plusieurs radios européennes. Le festival va développer ses ressources propres, qui ne sont aujourd’hui que de 13 % de son budget.

À terme, la manifestation de musique classique proposera trois académies à de jeunes musiciens. Contrairement aux festivals de Verbier ou Lucerne, ces académies mêleront des artistes en voie de professionnalisation à des musiciens expérimentés, sous la direction d’un chef, Mikko Franck (qui dirige l’Orchestre philharmonique de Radio France), pour la première académie cet été. La question de la transmission est au cœur du projet de Michel Orier. La gratuité de nombre de concerts, jusqu’en 2019, n’est plus à l’ordre de jour. Un espace de réflexion sur la musique (scientifique, économique, technologique...) prendra la forme d’un colloque de 2 ou 3 jours, mené en partenariat avec l’Université Paul-Valéry de Montpellier. L’édition 2023 (du 17 au 28 juillet) sera une édition de transition. Dès 2024, le festival aura lieu une semaine plus tôt afin de mieux capter artistes et publics. La programmation sera détaillée début mars. Le festival est partie prenante de la candidature de Montpellier au titre de capitale culturelle européenne 2028. 

Nicolas Dambre 

En partenariat avec La Lettre du spectacle n°530

Légende photo : Michel Orier

Crédit photo : D. R.

Réforme des retraites : la CGT-Spectacle dénonce une « double peine »

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retraites

Ce sont 1,12 million de personnes qui ont manifesté ce jeudi en France, selon le ministère de l'Intérieur, dont 80 000 à Paris. Les syndicats avaient appelé à protester contre la réforme des retraites du gouvernement, fixant l'âge légal de départ à la retraite à 64 ans. La CGT-Spectacle, majoritaire dans le secteur, est totalement opposée au report de l’âge légal de la retraite, de 62 à 64 ans. Estimant que « la situation de l’emploi est [dans le spectacle] pire que la moyenne », Elle dénonce une « double peine », arguant que le report de deux ans et l’allongement de la durée de cotisation va fortement pénaliser artistes et techniciens du spectacle dont « les périodes de précarité avant d’atteindre l’âge de départ vont augmenter ».

La Fédération nationale des syndicats du spectacle, du cinéma, de l'audiovisuel et de l'action culturelle souligne qu’une « forte proportion d’artistes et de technicien.nes du spectacle » ne sera pas concernée par la retraite minimale à 1 200 euros brut mensuels, pour une carrière longue, « du fait même des périodes de précarité ». Reprenant les arguments de sa confédération, la CGT-Spectacle plaide pour un retour à un départ à 60 ans et une pension minimum au niveau du smic qu’il voudrait à 2 000 euros. Le syndicat souhaiterait aussi une indexation des retraites sur les salaires, un retour aux 10 meilleures années pour le privé et aux 6 derniers mois dans le secteur public pour le calcul des pensions ainsi qu’une hausse du taux de cotisation. Les deux régimes spéciaux du spectacle – à l’Opéra national de Paris et à la Comédie-Française –, répondant à des sujétions spécifiques, ne seraient pas concernés par le projet de l’exécutif. L’ensemble des syndicats et l’essentiel des oppositions appellent à une nouvelle journée d’action ce mardi 31 janvier.

Nicolas Mollé 

En partenariat avec La Lettre du spectacle n°530

Légende photo : Lors des manifestations à Paris, le 19 janvier 2023

Crédit photo : D. R.

Vanves subit une baisse de subventions de 30 %

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Anouchka Charbey

Même si les têtes ne sont pas à la fête, le festival Artdanthé célèbre sa 25e édition du 11 mars au 1er avril avec toujours cette acuité qui a fait de la manifestation créée par José Alfarroba à Vanves et dans son théâtre municipal l’un des révélateurs le plus intéressant pour les arts du spectacle. Mais si la manifestation a repris dès l’année dernière son fonctionnement normal, Anouchka Charbey qui dirige à la fois la manifestation et le théâtre, a été informée dans le courant du dernier trimestre 2022 que le budget global sera diminué d’environ 30 %.

« Le festival 2023 est assuré et il ne sera pas affecté, rassure-t-elle d’emblée, avant de préciser, mais je ne sais pas pour l’année prochaine. Nous avons une année pour trouver une solution. Il n’y a pas de budget spécifique pour le festival, il est intégré dans celui du théâtre et s’il n’est pas question de supprimer cette manifestation, il est clair qu’avec 25 ou 30 % de baisse de subvention, il n’est pas possible de l’envisager sous la forme actuelle ». La directrice n’accable pourtant pas la municipalité qui a toujours soutenu cette manifestation emblématique : « la Ville a accumulé les difficultés de financement. Elle est bien gérée, mais avec l’augmentation du point d’indice, de l’énergie, l’inflation il manque un million pour boucler le budget ! Tous les services municipaux sont impactés. Certes la culture plus que d’autres, mais c’est aussi le plus gros poste budgétaire en dehors des services régaliens. En prenant le poste [Anouchka Charbey a succédé à José Alfarroba en 2015], je savais qu’il me faudrait gérer des baisses, mais là, c’est dur. »

Pourtant, l’édition 2023 du festival ne baisse pas pavillon et Vanves invite 7 festivals internationaux à présenter des chorégraphes émergents, dont beaucoup n’ont jamais été vus en France. « Nous avons une chance : la Ville nous laisse gérer l’artistique comme nous le voulons. On nous dit qu’il y aura des baisses mais on ne nous impose rien. Cela éloigne le vrai risque qui est celui du déconventionnement, comme pour certain de nos collègues de la région, reconnaît encore Anouchka Charbey qui admet cependant qu’il va lui falloir trouver une forme nouvelle pour assurer la pérennité de la  manifestation.

Philippe Verrièle 

En partenariat avec La Lettre du spectacle n°530

Légende photo : Anouchka Charbey

Crédit photo : D. R.

« L’institution continue de trop se focaliser sur le grand format »

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Aline César

3 questions à Aline César, autrice, metteuse en scène, directrice de la Compagnie Asphalte, copilote du groupe ÉgalitéS du Syndeac.

Les grands plateaux, les grosses productions sont-elles toujours la destination, l’objectif à atteindre ? 
Pour un artiste, c’est encore souvent un horizon, un graal. C’est l’idée de ne pas se limiter dans son imaginaire, envisager une scénographie conséquente, des moyens, beaucoup d’artistes au plateau. C’est ce qu’on projette spontanément, car notre éducation artistique s’est forgée au travers de cela. Mais aujourd’hui, cela ne correspond plus forcément aux imaginaires, aux esthétiques et aux désirs des artistes. Il y a un décrochage. L’institution continue de trop se focaliser sur le grand format comme critère de réussite. Cela est lié à la décentralisation et au maillage territorial : il faut remplir «les grandes salles», et le grand format est gage de visibilité, de rentabilité économique, de retentissement médiatique. Ce décrochage est aussi lié à la question de la transition écologique. Un grand plateau a un coût écologique important quant à la construction, au transport, au stockage...

Que permettrait une plus grande pluralité de formats ?
Le grand plateau n’est pas ce qui va correspondre à tous les propos. Il y a un enjeu à ouvrir à une diversité de formes, pour permettre d’autres récits, une relation plus proche avec le public. Des formats plus immersifs, sortir de la boîte noire et proposer des créations in situ, des promenades. Il y a un enjeu à habiter le monde autrement en tant qu’artiste. On pose un jugement esthétique sur ce qui est avant tout un modèle économique. Dans l’inconscient collectif, l’art monumental serait un gage du génie. Tout cela est très viriliste. Des récits de l’intime, du théâtre d’objets, de la marionnette, sont tout autant de la dentelle, or on leur attribue moins de valeur car ce sont des formats plus petits.

L’enjeu se situe-t-il également dans la relation aux publics ?
Ces formats peuvent permettre de décentrer – et non décentraliser – l’objet artistique, en allant plus vers le public. J’ai fait un solo à Avignon, en appartement, et je ne pouvais pas l’envisager autrement que dans un rapport très direct au spectateur que je voulais pouvoir regarder dans les yeux. Il ne s’agit pas de renoncer au grand format, mais il faut avant tout une diversité ; donner leurs lettres de noblesse à ces formats offrant d’autres rencontres avec le public, transfigurant le rapport à l’espace, au temps, renouvelant les expériences proposées. Des formes aussi moins gourmandes en énergie et en moyens.

Propos recueillis par Julie Haméon

En partenariat avec La Lettre du spectacle n°529

Crédit photo : D. R.