« Un plan de relance de 7,6 M€ en Île-de-France »

    Laurent Roturier

    Entretien avec Laurent Roturier, directeur de la DRAC Île-de-France, président de l’association des DRAC.

    A combien se montent les aides à la relance en Île-de-France ?
    Le ministère de la Culture a déployé un volant inouï d’aides, à la mesure de la crise que traverse le secteur. Le plan de relance dont on parle ici est seulement une des facettes des plans qui ont été mis en place. Il y a eu aussi les allègements de charge, le chômage partiel, le fonds de solidarité... Et il vient en complément des crédits de droits commun qui s’élèvent à 68 millions d’euros pour la création en Île-de-France. Le plan de relance 2021 pour la DRAC d’Île-de-France, c’est 12 à 13 % de plus, à ce jour, soit 7,6 M€ qui sont mis en œuvre en deux vagues.

    Qui en bénéficie ?
    Sur l’ensemble du champ culturel, en intégrant les librairies, éditeurs, salles de cinéma, etc., 550 structures en ont déjà bénéficié. Sur la création, la première vague du plan de relance (4,6 M€) a permis de soutenir 200 opérations supplémentaires dont 60 compagnies indépendantes. Nous serons sur un chiffre équivalent pour la deuxième vague (3 M€).

    Quelles sont les priorités ?
    Nous avons deux grands objectifs qui correspondent aux priorités ministérielles : la sauvegarde, c’est-à-dire faire en sorte que l’on retrouve un écosystème intact après la crise. à ce titre, les lieux labellisés de l’état ont un rôle éminent. Et nous sommes attentifs à ce que cette pérennité soit assurée aussi grâce au maintien des aides des collectivités. La deuxième priorité est la relance : être prêt lorsque la date de réouverture sera donnée, qu’il n’y ait pas de contrainte économique qui freinerait la reprise. En Île-de-France, nous avons aussi des objectifs spécifiques : l’équilibre entre les territoires en raison de la grande hétérogénéité entre la capitale et la grande couronne. Nous allons donc vers des opérateurs jusqu’ici peu soutenus, comme les tiers-lieux en zones rurales et des opérateurs qui s’adressent à la jeune création.

    Des exemples ?
    Je vous citerai un projet intéressant en Seine-et-Marne : la Douve blanche, à égreville, qui travaille avec les très jeunes talents de la musique électro. Dans l’Est parisien, je citerai la Station Gare des Mines (collectif MU) qui réunit une vingtaine d’associations. Il y a une volonté de la ministre d’aller vers les tiers-lieux. Nous avons choisi de ne pas travailler sous forme d’appel à projets. Nous faisons appel à la concertation avec les organisations professionnelles, les élus, et au travail d’expertise des équipes de la DRAC pour identifier des projets qui, jusqu’ici, ne pouvaient pas être soutenus parce qu’ils n’étaient pas dans les cadres habituels. La première vague a aussi permis de consacrer 1 M€ au projet de construction de la scène de musiques actuelles Forum II, à Vauréal, en investissement et 145 000 euros aux tiers-lieux. La deuxième vague est en train d’être programmée.

    Interviendrez-vous, à la reprise, pour compenser les jauges réduites ?
    Nous travaillons depuis décembre avec le Centre national de la musique sur les questions de jauges. On étudie en ce moment la question des festivals qui sont susceptibles d’avoir des jauges progressives, pour, de la même manière, qu’on puisse les soutenir avec des interventions différentes selon les modèles économiques. Sur le champ privé non musical, c’est soit l’Association de soutien au théâtre privé (ASTP) qui finance, soit le ministère de la Culture via la DRAC, mais pas les deux en même temps. Nous pouvons intervenir auprès de structures privées pour des aides économiques. Ce qui compte, c’est la manière dont les charges artistiques sont prises en compte.

    Quelles sont les perspectives pour 2022 ?
    Le plan d’aide va se poursuivre en 2022, mais on ne connaît pas encore les volumes. Il y aura sans doute une phase de reconquête de public qui aura pris d’autres habitudes. Nous travaillons aussi sur la question des festivals on voit bien que le tendance n’est plus d’aller vers le gigantisme, mais sur la proximité, des esthétiques plus pointues, avec des publics plus réduits. Les limites du système se voyaient déjà avant la crise. On commence à voir s’esquisser ce que sera l’après-Covid pour la culture.

    Propos recueillis par Yves Perennou

    En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°493

    Crédit photo : Sothean Nhieim