Copie privée : partie de poker autour des appareils reconditionnés

    week-end créatif de l’Adami

    La filière culturelle n’a pas attendu l’examen, le 10 juin, à l’Assemblée nationale de la proposition de loi visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique. Celle-ci recèle l’enjeu de l’exonération de copie privée pour les téléphones mobiles reconditionnés. Des abattements applicables aux appareils et tablettes de ce type ont été votés le 1er juin par la Commission pour la rémunération de la copie privée. Les ponctions seront de 40 % inférieures à celles pratiquées sur les appareils neufs (- 35 % pour les tablettes). Le monde de la culture a engagé une partie de cartes avec un acteur qui ne cesse de prendre du poids. « Le taux de pénétration du reconditionné est passé de 10 % il y a peu à 15 % et atteindra rapidement les 30 à 40 % », souligne Jean-Noël Tronc, directeur de la Sacem. Les « reconditionneurs » peuvent de plus se prévaloir d’une double aura positive : sociale et écologique. Capables de jouer le va-tout de l’économie sociale et solidaire à travers Emmaüs Connect comme celui du « vert », le principe du reconditionnement se coulant dans l’économie circulaire.

    La culture, elle, défend son 1,3 million d’emplois et ses revenus. « 12 000 artistes ont bénéficié d’aides d’urgence dans le cadre de la crise sanitaire », souligne la comédienne Anne Bouvier, présidente de l’Adami. « Dans la mosaïque de droits des artistes, 75 % de ce qui provient de la copie privée constitue pour les artistes un revenu, tout simplement. » Bruno Boutleux, président de Copie France, directeur de l’Adami, signale que « 64 % des festivals de musique sont financés grâce à la copie privée. Celle-ci peut occuper jusqu’à 7 euros sur le prix d’un billet ». La filière du spectacle vivant est structurée par les aides des sociétés de gestion, que l’État aurait bien du mal à compenser. On comprend donc que le maintien des appareils reconditionnés dans la copie privée bénéficie du soutien politique du Premier ministre (le gouvernement a pesé pour la mise en place de l’étude qui a abouti à de nouveaux barèmes), de Jack Lang et de l’actuelle ministre de la Culture, Roselyne Bachelot.

    Nicolas Mollé

    En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°496

    Légende photo : Un week-end créatif de l’Adami à la Gaîté lyrique, à Paris, en 2019

    Crédit photo : Quentin Chevrier