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Comment les lieux gèrent la crise énergétique

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LS107 Grande enquete

Malgré « l’amortisseur d’électricité » mis en place par le gouvernement, la hausse du coût des énergies affecte durement des lieux de diffusion déjà fragilisés par deux ans de crise sanitaire. 

Ils n’en meurent pas tous, mais tous sont touchés. Ou le seront. Les différents statuts des lieux de diffusion – privé, public en régie directe, sous délégation de service public (DSP), associatif, etc. – et les nombreuses dates de renouvellement des contrats de fourniture d’énergie multiplient les cas de figure. Par exemple, la commune d’Annecy règle les factures du Théâtre municipal, en régie directe. « La commune a un contrat de gaz qui dure encore un an, nous n’avons donc aucun impact, pour l’instant, sur le coût du chauffage, avance la directrice du théâtre, Eva Duchamp-Konickova. La mairie est en pleine négociation pour le renouvellement du contrat, et ce sera sans doute différent la saison prochaine. Cela étant, nous sommes sensibilisés sur le sujet comme l’ensemble des services municipaux. Nous sommes passés à 19 degrés depuis le 1er octobre, par exemple. » 

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Par Bruno Walter

Légende photo : En s’équipant de LED, Viadanse a divisé par 8 ou 10 sa consommation d’énergie.

Crédit photo : D. R.

Des projets jeune public fragilisés

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LS107-Remboursez

Ce secteur déjà doté de peu de moyens compte parmi les plus durement affectés par la crise des finances publiques.

Déjà ancrée depuis plusieurs années dans le paysage, la crise du financement public de la culture a pris un autre tournant. Entre choix politiques affirmés, comme en région Auvergne-Rhône-Alpes, et conséquences de la crise énergétique sur les finances publiques, l’avenir s’obscurcit un peu plus pour les projets de spectacle vivant, concernés en premier chef par les coupes budgétaires. On observe alors que les périodes de transition, au départ du fondateur ou de la fondatrice, conjuguées à ce contexte économique difficile, conduisent régulièrement à des situations de crise. C’est le cas, notamment, pour les projets jeune public pionniers, nés dans les années 1990, parfois même bien avant. À Clermont-Ferrand (63), le Théâtre du Pélican, compagnie de théâtre fondée dans les années 1970 et devenue depuis un « centre de création et d’éducation artistique pour l’adolescence et la jeunesse », en a fait l’amère expérience. 

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Par Cyrille Planson

Légende photo : En juin dernier, le Théâtre du Pélican accueillait des jeunes de toute l’Europe.

Crédit photo : D. R.

Un Richard II 2.0 aux Amandiers

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Richard II

Rarement adapté au théâtre du fait de la complexité de ses intrigues, surtout dans son premier tronçon, le Richard II de Shakespeare revu et visité par le directeur du théâtre des Amandiers, Christophe Rauck, a bénéficié d’un certain nombre d’innovations techniques. Avec, en premier lieu, un voile à la sombre transparence, sorte de rideau intermédiaire sur lequel sont projetés des inscriptions sous forme d’aplats numériques tout en permettant de distinguer le jeu des acteurs sur le plateau. « Nous avons mis du temps à le trouver, il permet environ 60 % d’opacité, remarque le scénographe Alain Lagarde. Grâce à lui nous avons la dualité du réel et de la vidéo. Il permet d’amener ce moment où l’on fait parler les aïeux, comme une émanation du passé, des épiphanies, jusqu’à ce que le roi Richard déchire le voile et qu’on se retrouve dans le présent. »

La vidéo est ici utilisée à double titre : elle illustre les éléments de la nature comme l’air, le vent, la mer, le brouillard, qui font partie de l’œuvre, mais a aussi un rôle dramaturgique au-delà de la technique et donne parfois un autre point de vue aux scènes, notamment dans la partie finale où le roi solitaire dérive vers sa fin dans un monologue introspectif. « Pour cela, nous avions deux caméras, une fixe à jardin, l’autre sous forme de tourelle robotisée mobile fixée sur le grill technique au dessus du plateau, détaille Etienne Guiol, chargé de la vidéo. Nous voulions parvenir à mettre en scène cette vision du roi seul, parlant à la nuée, au ciel ». Après Avignon, une série de dates à Nanterre (92) ou à Vélizy-Villacoublay (78) les 20 et 21 octobre, le spectacle sera donné le 8 novembre au Foirail à Pau.

Nicolas Mollé

En partenariat avec La Lettre du spectacle n°524

Légende photo : Richard II est interprété par Micha Lescot.

Crédit photo : Géraldine Aresteanu

Litige : la montgolfière du Cirque Inextremiste sous pression

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montgolfière

Imbroglio juridique autour d’un spectacle de cirque. Suite à un changement de réglementation, la Direction générale de l’aviation civile (DGAC) conteste la possibilité de jouer le spectacle Exit, du Cirque Inextremiste. En cause : l’utilisation d’une montgolfière à laquelle les artistes se suspendent pour effectuer des acrobaties. Le préfet du Maine-et-Loire a interdit les représentations à Angers, les 9 et 10 septembre, faute de respect de la réglementation sur les aéronefs. « La mairie pressait pour que le spectacle ait lieu, indique Yann Ecauvre, directeur artistique de la compagnie. Ils ont proposé que le ballon soit soulevé par une grue, mais une telle adaptation à trois jours de la représentation, nous mettait en danger, donc nous avons joué sans rien changer. » Des suites judiciaires sont possibles : « La préfecture a saisi le procureur, qui voudrait nous poursuivre, mais nous n’avons pas de nouvelles depuis. »

Déjà fin août le spectacle était programmé au festival des Rias, et la compagnie avait reçu une lettre interdisant le décollage du ballon, même si le spectacle a joué normalement. Depuis, Exit s’est répété avec des fortunes diverses. À Chaumont, la préfecture n’a pas interdit la représentation, mais la DGAC a procédé à un contrôle sur place et a ensuite signifié à la compagnie la liste des infractions commises, dont la violation de l’interdiction des vols de nuit. À Rezé, la préfecture a interdit le décollage de la montgolfière, qui a donc été arrimée au sol. « Pour la DGAC, à partir du moment où la montgolfière décolle d’un centimètre, il faut appliquer leurs règles, précise Yann Ecauvre. Et il faudrait être un pilote licencié, avec des centaines d’heures de vol… alors que mon ballon est captif, et qu’il ne s’élève qu’à 15 mètres ! ». L’artiste ajoute : « C’est un peu une première mondiale dans le cirque, un spectacle qui a autant joué dans autant de pays, et qui soudain serait interdit ! ».

Jean-Luc Prévost, membre de l’Observatoire de la liberté de création, suit cette affaire de près, même si, pour lui, ce n’est pas la création même qui est en cause : « C’est un problème de conformité avec la législation sur les aéronefs, mais nous apporterons, si nous le pouvons un appui politique pour discuter avec les préfets. » En attendant, la compagnie ne sait pas ce qu’il adviendra de ses futures dates, et Yann Ecauvre en vient à souhaiter l’engagement de poursuites « pour faire avancer les choses en créant une jurisprudence ».

Mathieu Dochtermann

En partenariat avec La Lettre du spectacle n°524

Légende photo : Lors d’une représentation à Lublin en Pologne dans le cadre du Carnaval Sztukmistrzów.

Crédit photo : Wojtek Pacewicz

« Il y a une révolution écologique systémique à opérer »

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Cochet

3 questions à Bruno Cochet, directeur du Théâtre de Rungis, membre du bureau du SNSP

Quels sont les postes les plus émetteurs en gaz à effets de serre dans un théâtre ? 
Ils sont au nombre de trois mais cette hiérarchie est légèrement contre-intuitive dans la mesure où le premier d’entre eux, le transport des publics, n’émane pas directement du théâtre. Ensuite, surviennent en deuxième ou troisième position, en fonction du type de bâtiment, le chauffage ou le transport des artistes. Ces trois facteurs pèsent pour 90 % de ce type d’émissions. À Rungis, nous avons mis en place sur notre site Web une plateforme de covoiturage et un calculateur de l’impact carbone. Il y a même aujourd’hui un projet du SNSP [Syndicat national des scènes publiques] de travailler avec nos éditeurs de logiciels de billetterie pour les faire converger avec les possibilités de co-voiturage au moment des réservations, tout en conservant la confidentialité à laquelle nous oblige le règlement général sur la protection des données. Depuis juin, nous avons mis en place une prime incitative, en plus de l’obligation pour l’employeur de prendre en charge 50 % des frais de transport, pour encourager les mobilités douces. Elle est de 120 euros par an. Nous prévoyons aussi une clause transport bas carbone dans les contrats de cession engagés auprès des compagnies et des artistes.

Est-ce que certains la refusent ? 
Il ne s’agit pas d’une contrainte mais d’une incitation, d’une sensibilisation. S’ils viennent en camion ou en voiture, on ne refusera pas pour autant de les programmer. Il y a une révolution écologique systémique à opérer pour faire en sorte que les tournées se fassent dans un esprit coopératif, afin de maintenir un service public des arts de la représentation plus respectueux de la planète. Jusqu’à maintenant, était avant tout recherchée une grande singularité, voire de l’exclusivité, dans les programmations, ces valeurs doivent évoluer au profit de saisons plus coconstruites à l’échelle d’un territoire, tout en maintenant la diversité des formes.

Parlons de vos compteurs mesurant les consommations, qui en est à l’initiative ? 
Deux sont en place depuis juin 2021, l’un concerne la centrale chaud et froid, l’autre est installé à l’entrée et mesure la tension électrique de la scène. C’est la ville qui les a installés. Beaucoup de bâtiments sont municipaux ou appartiennent à la communauté d’agglomération, c’est notre cas, nous n’avons pas la main sur notre système de chauffage. L’idée n’est pas seulement de passer à 19° mais d’aller vers la rénovation thermique des bâtiments ou des éclairages LED, des investissements souvent lourds. La plupart des bâtiments sont vieillissants, issus des années Lang, l’état aura une responsabilité forte pour accompagner les collectivités territoriales. Pourquoi ne pas se lancer dans un plan européen de rénovation des bâtiments ?

Propos recueillis par Nicolas Mollé

En partenariat avec La Lettre du spectacle n°524

Crédit photo : D. R.

De la parité à l’égalité réelle : l’heure du passage à l’action

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parité

Le Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac) s’est engagé à publier chaque année son comptage concernant « la place des artistes femmes programmées dans le spectacle public ». Attendu pour le 17 octobre, il devrait permettre d’observer les évolutions depuis la première étude sortie en octobre 2021. Celle-ci posait alors un constat édifiant : seules 35 % de femmes programmées et 29 % d’autrices de spectacles. Un engagement qui témoigne de la « vigilance du syndicat sur ce sujet », note-t-on au Syndeac. La problématique est sensiblement la même concernant les concerts. Car la musique est loin d’être première de la classe en la matière. Une enquête du ministère de la Culture publiée en 2020 montre que, depuis cinquante ans, toutes les pratiques culturelles se féminisent, sauf la musique. « Dans une période où le secteur musical entier s’interroge sur la représentation des femmes dans les studios ou sur scène, La Nef vient se questionner naturellement sur le parcours des musiciennes en Charente », expose Typhaine Pinville, docteure en musicologie. Autrice de l’étude initiée par la scène de musiques actuelles d’Angoulême, restituée le 16 septembre, elle apporte un éclairage sociologique au sujet. Le point de départ : les filles sont aussi nombreuses que les garçons à apprendre la musique dans l’enfance, pourtant, à l’âge adulte, elles ne représentent que 15,1 % des usagers des studios de répétition et 17,4 % des artistes programmés, selon un rapport de la Fédération des lieux de musiques actuelles, publié en janvier 2021. Quelles sont les raisons de cette évaporation ?

S’appuyant sur le recueil de données collectées auprès de 8 établissements, 150 élèves et 12 musiciennes, l’observation locale charentaise cherche à préciser les problématiques. Parmi celles-ci, d’abord des pratiques musicales très genrées : 14 % de filles à la batterie, 12 % à la basse, 17 % à la guitare, 54 % au piano et 64 % au chant. « Les filles interrogées optent surtout pour des instruments dits “féminins” (voix, piano-clavier, guitare) faisant directement référence aux stéréotypes de genre comme la fragilité, le calme, la douceur, la timidité ou encore l’intériorité » tandis que les garçons se tournent vers des instruments reliés à la force, à la technologie, au bricolage, lit-on dans l’étude. Puis, à l’adolescence, les filles se tournent vers un apprentissage encadré, plutôt qu’autonome au sein de groupes, dont elles ne représentent ensuite que 9 % des membres. Jusqu’à l’âge adulte, un long processus amène les filles devenues femmes à se délégitimer : « Cette auto-éviction, ce manque de légitimité les contraint à des parcours musicaux interrompus, s’effaçant doucement et dangereusement du paysage musical. » Il reste, à l’issue, peu de femmes musiciennes. « La plus-value d’une enquête locale est aussi de commencer à mettre cette question à l’ordre du jour des acteurs locaux, en objectivant les faits, précise Laëtitia Perrot, directrice de La Nef. Faire comprendre que ce ne sont pas des problèmes individuels mais systémiques. »

Le Syndeac et La Nef appellent tous deux à un passage à l’action immédiat. « Il y a urgence, on ne peut pas attendre 15 ans et une ou deux générations pour faire évoluer les schémas », déclarait en 2021, Nicolas Dubourg, président du Syndeac. Parmi les préconisations de l’étude charentaise : la prise en compte des attentes des musiciennes quant à l’accompagnement, un cycle de mentorat, des initiations multi-instruments dès la petite enfance, rendre visible les femmes dans les différents métiers, organiser une large sensibilisation dans les lieux d’éducation, ou encore garantir des financements égalitaires. Il s’agit avant tout de produire un éveil conscientisé et de « fédérer autour d’actions communes de fond », sortir d’une logique purement comptable visant la parité pour « déconstruire les injonctions de genre et œuvrer pour une liberté éclairée visant des pratiques non-genrées », conclut Laëtitia Perrot. Une démarche qui intéresse déjà au plus haut niveau, ayant notamment recueilli le soutien du ministère de la Culture et de Reine Prat, haute fonctionnaire autrice de deux rapports ministériels sur l’égalité femmes / hommes dans la culture.

Julie Haméon

En partenariat avec La Lettre du spectacle n°523

Légende photo : Répartition des formes de pratiques musicales selon le genre 

Source : SMAC d’Angoulême

Créteil : la nomination de Mehdi Kerkouche interroge

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Mehdi Kerkouche

L’absence de réaction à la nomination, le 14 septembre, de Medhi Kerkouche à la tête du Centre chorégraphique national de Créteil marque une certaine gêne… Toujours pas de communiqué de l’ACCN (Association des centres chorégraphiques nationaux) ou de toute autre institution, à l’exception du ministère de la Culture. Aborder la question avec un professionnel, programmateur ou artiste, c’est s’attirer un sourire un peu gêné et à part quelques gausseries sur les réseaux sociaux (à propos de « danses chorégraphiques » concept hasardeusement avancé par le nouveau directeur Cristolien), personne ne veut prendre la parole : « On verra bien, il est très sympathique », quand d’autres rappellent : « la dernière fois que l’on a protesté contre une nomination, on s’est tellement fait taper sur les doigts ! »…

Olivier Stora, nouveau directeur de Danse Dense à Pantin, principale structure dévolue à l’accompagnement des chorégraphes émergents, expose : « J’espère qu’une digue n’a pas cédée, c’est-à-dire que la reconnaissance par les pairs reste un critère », car, faute de cette reconnaissance et des créations qui la justifient, peut-on devenir directeur d’un centre chorégraphique ? Le communiqué du ministère est à cet égard édifiant : il n’utilise pas une fois le mot chorégraphe. Si l’on admet que ce dernier n’est pas celui qui compose les danses (travail de maître de danse ou de ballet) mais qui signe une œuvre chorégraphique, le successeur de Maguy Marin, José Montalvo et Mourad Merzouki n’en a que deux à son actif. Les réseaux sociaux diffusent la prestation du jeune homme dans le concours de chant X Factor, en 2011, mais pas tellement, et pour cause, ses spectacles. Ses vidéos produites pendant le confinement ont été très remarquées et lui ont valu de « signer » une pièce pour l’Opéra de Paris : sa carrière de chorégraphe n’est guère plus riche que celle de la majorité des professeurs de danse (il en fut un très bon au Studio Harmonic, à Paris).

Dès lors pourra-t-on aujourd’hui dénier à quiconque veut diriger un CCN le droit de le faire quelle que soit sa carrière ? Celle de Mehdi Kerkouche est celle d’un danseur parfaitement à l’aise dans le monde télévisuel, il n’est pourtant qu’un chorégraphe très médiatique mais en devenir. La volonté de maintenir l’appel à candidatures peut se discuter aussi, quand la short-list, de quatre, s’est réduite à deux noms au fil des désistements. « À quoi cela sert de vouloir absolument maintenir un label si personne n’en respecte l’esprit ? », demande Christophe Martin qui, depuis Micadanses qu’il dirige, connaît fort bien les problématiques de l’émergence. « Un directeur de CCN doit avoir une œuvre en regard ; si ce n’est pas possible, il ne faut pas s’obstiner à garder le label. Cela permettrait aussi d’avoir un nouveau CCN dans une nouvelle ville. Cela pourrait être un signe fort ! »

Philippe Verrièle

En partenariat avec La Lettre du spectacle n°523

Légende photo : Mehdi Kerkouche

Crédit photo : Julien Benhamou

Disparition : le prisme théâtral méconnu de Godard

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Jean-Luc Godard

« Jean-Luc Godard était un artiste essentiel et je pense un de ceux qui ont le plus influencé le théâtre contemporain de ces dernières années, énonce Vincent Baudriller, directeur du Théâtre de Vidy-Lausanne en Suisse, qui fut aussi codirecteur d’Avignon de 2003 à 2013, avec Hortense Archambault. Lorsque j’accueillais de jeunes metteurs en scène à Avignon, ils le citaient beaucoup plus parmi leurs influences majeures que Jean Vilar ». Le rapport postmoderne à la narration du cinéaste, son lien entre le texte et l’image a été déterminant pour de nombreux metteurs en scène d’aujourd’hui. Mais c’est une autre génération de dramaturges, celle de François Billetdoux et d’Antoine Bourseiller, qui émerge en 1967 à Avignon, lorsque Jean Vilar a l’intuition que le monde est en train de changer et décide d’une édition d’ouverture, annonciatrice des bouleversements de mai 68, avec La Messe pour le temps présent, partition de Pierre Henry portée par Maurice Béjart et surtout la projection de La Chinoise de Jean-Luc Godard, en sa présence.

« En 2010, nous avions re-projeté La Chinoise et organisé un débat avec son éditeur Paul Otchakovsky-Laurens, présentant aussi son Film Socialisme mais, comme souvent, Jean-Luc Godard n’était pas venu. » Il n’y eut cependant pas que des actes manqués. Originaire d’une famille installée à Nyon, en Suisse, et habitant depuis 1978 à Rolle, à trente kilomètres de Lausanne, le cinéaste avait tourné une partie de For Ever Mozart à Vidy. « Lorsqu’il a conçu Le Livre d’image, il ne voulait pas le projeter au cinéma au départ, poursuit Vincent Baudriller. Avec Fabrice Aragno, son assistant et chef opérateur, ils nous ont contacté et m’ont invité à Rolle, Godard m’a projeté Le Livre d’image. Puis il est venu 15 jours à Vidy, il a presque reconstitué son salon sur la scène d’une de nos salles, la passerelle, les spectateurs étaient entourés de hauts-parleurs, nous avions même allumé un cigare dans un couloir, pour l’odeur ».

Nicolas Mollé

En partenariat avec La Lettre du spectacle n°523

Légende photo : Le Livre d'Image, de Jean-Luc Godard

Crédit photo : D. R.

Le Hellfest et Disneyland Paris se disputent le plus grand parking

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Hellfest

Accueil du public. 13 000. C’est le nombre, astronomique, de véhicules accueillis cet été sur le nouveau parking du Hellfest. Un chiffre près de deux fois plus élevé que la population de sa commune d’accueil, Clisson (44). Et qui place ce parking au premier rang des aires de ce genre en France. Devant celui du parc d’attraction géant Disneyland Paris avec ses « seulement » 11 200 places. Actuellement, « il n’y a pas de projet d’extension du parking visiteurs », selon une porte-parole de Disneyland Paris. Même si des travaux sur les parkings réservés aux employés du parc d’attraction ont été évoqués au cours d’un comité social et économique (CSE) central d’entreprise. Chez Disney, le dialogue social est animé. Une intersyndicale CFTC, CGT et UNSA y dénonce parallèlement certaines carences dans des négociations autour du temps de travail. De son côté, le Hellfest ne veut pas bétonner son parking. « L’idée est que cet espace retrouve sa vocation agricole le reste de l’année. Nous allons nous mettre en relation avec des exploitants. Nous ne sommes fermés à rien : faire du foin, accueillir des chevaux, des moutons... », communique-t-on au Hellfest.

Reste qu’en pleine débâcle écologique, une telle surenchère de véhicules thermiques pose question. Disneyland Paris met volontiers en avant la centrale photovoltaïque géante installée sur son parking, signalant aussi les flux importants en provenance des gares RER et TGV de Marne-la-Vallée-Chessy. Pour le Hellfest, les rotations de TER entre Nantes et Clisson se sont avérées insuffisantes, faisant ressembler le temps du trajet les rames à de véritables bétaillères, avec une promiscuité peu compatible avec les « gestes barrières ». Le Hellfest signale qu’entre 5 et 8 rames sont rajoutées au trafic selon les journées : « De plus en plus de festivaliers choisissent de venir en train, ce qui est une bonne nouvelle. La Région mettant en place ces nouvelles rames, nous allons rediscuter avec elle. »

Nicolas Mollé

En partenariat avec La lettre du spectacle n°522

Légende photo : Au Hellfest

Crédit photo : Startair-Drone

La Gaîté Lyrique se veut à la pointe de la sobriété numérique

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La Gaîté Lyrique

Notre utilisation compulsive des applications sur smartphones est-elle en train d’amplifier les problématiques écologique en cours ? Leur promotion incessante à de nombreux échelons de la société pose en tout cas question à l’heure où téléphones, tablettes et autres écrans connectés sont responsables de 10 % de la consommation électrique française (soit l’équivalent annuel de ce qu’utilisent 8,3 millions de foyers) d’après l’Ademe. Celle-ci ajoute que le numérique génère 3,5 % des émissions mondiales de gaz à effets de serre, plus que le transport aérien civil (2 %), cette « empreinte carbone » étant amenée à doubler d’ici 2025. Dans le journal du CNRS, on apprend même que des chercheurs travaillent à limiter (en différant les sauvegardes) les interactions des applis vers les serveurs des data centers aux moments de la journée où les énergies renouvelables (solaires par exemple) peuvent prendre le relais.

L’un des enjeux est aussi de dégraisser le code informatique de certains contenus, comme s’emploie à le faire La Gaîté-Lyrique à Paris. « Nous sommes plateforme d’expérimentation avec notre site web pour déterminer quels en sont les facteurs de sobriété, indique Laëtitia Stagnara, directrice générale de la Gaîté Lyrique. Nous travaillons pour ce faire avec l’entreprise Témésis dans le cadre de la mission interministérielle “Green Tech” ». La Gaîté Lyrique, gérée en délégation de service public pour le compte de la Ville de Paris, avec une compensation financière de cette même ville d’environ 50 % de son budget de 8 M€, a d’ailleurs dans son ADN la recherche de solutions pour maîtriser l’empreinte environnementale collective.

Son programme Gaîté (Re)cycle inclut le lancement, depuis le 17 septembre et pendant 3 mois, d’un Repair Café assuré par Crealab 94 où les équipements informatiques et électroniques sont restaurés. Une démarche accompagnée d’ateliers de réappropriation des déchets électroniques par des artistes ou par un point de collecte des déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) en vue d’un réemploi ou d’une revalorisation. « Il peut s’agir de petit électroménager, de câbles, d’anciennes disquettes, énumère Laëtitia Stagnara. La personne qui cède un objet se voit remettre un ticket d’exposition à prix réduit, cela aboutit à quelque chose d’assez vertueux, comme une boucle qui se nourrit d’elle-même ». D’après Laëtitia Stagnara, une tonne de cartes mémoire équivaut à 1,5 kg d’or et une tonne de vieux ordinateurs est valorisable à près de 800 €. Un circuit local de recyclage offre, selon la Gaîté Lyrique,  une alternative aux décharges sauvages chinoises, indiennes ou du Ghana, où les équipements informatiques, pour récupérer les métaux précieux qu’ils contiennent, sont brûlés dans des conditions écologiques et humaines désastreuses.

Nicolas Mollé

En partenariat avec La Lettre du spectacle n°522

Légende photo : La Gaîté Lyrique

Crédit photo : D. R.