
En 2024, c’est l’Opéra national de Paris qui avait été la cible des magistrats financiers. Cette année, la Cour des comptes a scruté 11 maisons d’opéra sur les 30 de l’Hexagone – dont 6 pour la seule Région Île-de-France.
Si, « par leur rayonnement [elles] contribuent à la renommée et à l’attractivité culturelle de la France et des différentes régions », dans les faits leur situation est d’« une grande hétérogénéité » notamment en raison « d’une diversité des statuts déterminant leur mode de gestion, et de leurs composantes artistiques. »
Régie inadaptée
En plan large, la Réunion des opéras de France (ROF) a estimé que la quasi-totalité des maisons d’opéra représentait en 2022 une dépense de 589 millions d’euros, dont 398 millions de financements publics. Elles sont gérées pour la plupart en régie « alors que le statut d’établissement public de coopération culturelle, plus adapté à une transparence de gestion et aux missions des maisons, reste marginal ». Des différences qui se retrouvent dans « les labels et appellations délivrés par le ministère de la Culture » aux différences « peu lisibles ». Autre grief de la Cour, qui s’est entourée de ses chambres régionales pour l’occasion, une « méconnaissance de leur public » qui constitue « un frein à leur évolution », car elles sont désormais dans l’obligation de « relever le défi de renouveler leur public en adaptant leur offre », le tout avec des moyens contraints. « La connaissance des publics est pourtant essentielle aux choix de programmation des spectacles et à la mise en œuvre d’une politique tarifaire adaptée », ajoute le rapport qui assure que « l’offre culturelle des maisons doit ainsi répondre à un besoin de diversification des audiences et de création artistique ». Une diversification géographique, sociologique et générationnelle qui « peine à prendre forme » sur les actions en direction des scolaires qui ne touchent qu’« un nombre limité de classes ».
Dans ses recommandations la Cour insiste sur la nécessité de « définir une stratégie de coordination commune entre l’État et les collectivités territoriales », le premier ciblant son intervention sur l’Opéra national de Paris, opérateur du ministère de la Culture aujourd’hui face à un mur d’investissement. « Les subventions attribuées aux maisons d’opéra en région par le ministère ne sont pas cohérentes avec les labels et appellations qu’il attribue : le montant de ses subventions n’est pas fixé en fonction du cahier des charges de chacun des deux labels (opéra national en région et scène lyrique d’intérêt national) et de l’appellation scène conventionnée d’intérêt national ».
Quels labels ?
Encore moins cohérent quand l’État finance des maisons qui « ne bénéficient d’aucun label ou appellation ». Un brouillard à « clarifier » qui vaut aussi pour la Réunion des opéras de France (ROF), que la Rue de Valois a conventionnée notamment sur la collecte des données (moyens financiers, programmation, fréquentation) : son rôle et sa place comme partenaire du ministère « doivent être mieux définis dans la prochaine convention, tout comme les moyens de remplir les missions qui lui sont confiées. »
Recommandations
La Cour des comptes a formulé plusieurs recommandations pour les maisons d’opéras :
- améliorer la connaissance des publics pour construire des politiques tarifaires adaptées et une stratégie d’attractivité ;
- veiller à une évaluation des coûts des coproductions ;
- clarifier les critères pour l’attribution des subventions ;
- assurer un suivi annuel de l’exécution des conventions avec des objectifs (ministère) ;
- concertation avec la ROF et les collectivités pour inciter au statut d’établissement public de coopération culturelle.
Jérôme Vallette
En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°586
Crédit photo : Martin Argyroglo