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Production : un accompagnement à 360 degrés

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Cécile Gaurand, Amandine Bessé et Elsa Maupeu

Délester les compagnies en matière d’administration, de diffusion, de production : des bureaux d’accompagnement à 360 degrés existent. Parfois ils sont même aux services des lieux. Comment fonctionnent-ils ?

« On défend nos métiers car ils ont parfois été mal perçus et beaucoup en sont partis. » Ainsi parlent Elsa Maupeu, Amandine Bessé et Cécile Gaurand, du bureau Iceberg, qui depuis la naissance de leur structure en 2019 (et après un cheminement commun préalable dans le collectif La Grande Régie) sont au maximum de leur capacité en gérant 18 à 20 compagnies à l’année depuis la cité de la création et de l’innovation de Tours, où elles sont installées. Pour en rajouter – une liste d’attente existe –, il faut recruter, mais c’est tout sauf évident, disent-elles, tant leur secteur a été déserté après le covid. Leur travail ? Accompagner les artistes dans des formules annuelles et reconduites tacitement la plupart du temps dans des formules « classiques » (à 360 degrés), « ponctuelles » (sur un point précis de budget, de stratégie de diffusion à débloquer, etc.) ou « solidaires » (aide à la structuration). En Centre-Val de Loire, ces trois expertes ont pris le parti d’être chacune la référente intégrale de certaines compagnies afin qu’elles n’aient qu’une seule interlocutrice qui les accompagne, notamment dans leurs rendez-vous avec des structures ou tutelles. De son côté, Jean-Luc Weinich, fondateur de Rustine en 2016 et basé à Lyon, a fait le choix inverse : multiplier les professionnels en fonction des besoins des compagnies, lui s’occupant de chapeauter le tout. 

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Par Nadja Pobel

Légende photo : Cécile Gaurand, Amandine Bessé et Elsa Maupeu, co-fondatrices d’Iceberg

Crédit photo : Matthieu Gillot

Des festivals en quête de perspectives

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No Logo festival

Après une année 2024 difficile, les organisateurs de festivals abordent 2025 dans l’intranquillité. Les charges courantes explosent, les cachets des artistes aussi, et l’austérité menace les finances publiques.

Du public, beaucoup de public, et des déficits, beaucoup de déficits : le bilan provisoire de la saison des festivals dressé en octobre par le Centre national de la musique (CNM) et le ministère de la Culture confirme la tendance déjà observée l’an dernier. Tendance inquiétante : le succès public n’est pas garant de la pérennité financière. Près de la moitié des festivals présentant un taux de remplissage de plus de 90 % sont déficitaires. « Cette année, nous avons eu plus de 250 000 festivaliers, sur une jauge de 280 000, mais nous terminons avec un déficit de 1 million d’euros sur un budget de 22 millions d’euros », témoigne ainsi Jérôme Tréhorel, directeur des Vieilles Charrues, un festival peu habitué à terminer dans le rouge. « Nous arrivons tout juste à l’équilibre cette année, sur un budget de 2,3 millions d’euros, alors que nous avons bénéficié d’une météo parfaite, d’une belle affluence avec plus de 50 000 festivaliers, constate Florent Sanseigne, directeur du No Logo, dans le Jura. On ne peut plus mettre un peu de côté comme nous le faisions. Et beaucoup de festivals sont dans notre cas, avec des affluences entre 95 et 100 %, mais qui terminent tout juste à l’équilibre ou carrément déficitaires. »

Selon le bilan provisoire, les Jeux olympiques n’auraient touché que 10 % des festivals. Parmi les victimes, le Delta Festival, à Marseille, déplacé d’août à septembre. Son public cible, les jeunes étudiants, les vacanciers, a manqué à l’appel et la fréquentation a chuté de 150 000 à 85 000 festivaliers. Le Delta enregistrera un déficit – non encore arrêté – de plusieurs centaines de milliers d’euros, pour un budget de 12 millions d’euros, et sollicitera en janvier le fonds de compensation mis en place par le ministère. 

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Par Bruno Walter

Légende photo : Au No Logo festival

Crédit photo : Antoine Saba

Oser le mécénat de compétences

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Caroline Strauch

Possibilité de s’adjoindre des compétences spécifiques, émulation ou encore renforcement des liens entre secteurs culturel et économique : les avantages procurés par ce type de mécénat sont nombreux.

Contrairement au mécénat financier ou en nature, le mécénat de compétences – qui consiste en la mise à disposition, par une société, d’un salarié rétribué par elle – est aujourd’hui peu pratiqué au sein des lieux culturels, mais aussi des entreprises. « Seules 9 % à 15 % d’entre elles mobilisent ce type de mécénat. La marge de progression est donc importante », rappelle Yann Queinnec, délégué général de l’Association pour le développement du mécénat industriel et commercial (Admical). En cause, une méconnaissance du dispositif (notamment des avantages fiscaux dont bénéficient les entreprises, 60 % du salaire et des charges patronales donnant droit à une réduction d’impôts), perçu en outre comme complexe à mettre en œuvre.

Identification des besoins 
Solliciter un soutien en compétences requiert, il est vrai, du temps (entre dix-huit mois et deux ans), une méthodologie et la présence d’une personne dédiée au mécénat, qui en connaît les arcanes et sera donc apte à informer – voire à rassurer – les services juridique et financier de l’entreprise sur la marche à suivre. Bien qu’avoir fondé un cercle de mécènes représente un indéniable atout et un gain de temps, il est également possible de construire des relations individuelles. En témoigne le processus initié voici cinq ans par Caroline Strauch, responsable du mécénat et des partenariats au Théâtre national de Strasbourg (TNS), qui souhaitait enrichir la formation dispensée dans les sections techniques (son, lumière, vidéo) de l’école. « Après m’être rapprochée de fabricants pour du don de nouveau matériel, j’ai réalisé que sa prise en main nécessitait des compétences, explique-t-elle. Aussi leur ai-je demandé s’ils accepteraient d’accompagner les étudiants. » 

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Par Marie-Agnès Joubert

Légende photo : Caroline Strauch, responsable du mécénat et des partenariats au Théâtre national de Strasbourg

Crédit photo : D. R.

Vers un embargo sur l’open bar ?

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Lisa Bélangeon

Alors que la consommation d’alcool est une habitude culturelle fortement ancrée dans les musiques actuelles, le secteur commence à s’interroger sur ses limites et paradoxes.

Un nouveau tabou se fissure. Si celles et ceux qui s’emparent du sujet sont parfois taxés d’« empêcheurs de tourner en rond », partage Lisa Bélangeon, coordinatrice générale du festival Au foin de la rue, leurs inquiétudes reposent pourtant « sur de vrais risques et la conscience que les conséquences peuvent être graves ». Le sujet est polymorphe : des publics aux salariés en passant par les artistes et les bénévoles, les points de départ divergent et viennent aussi bien bousculer des habitudes que des modèles économiques.

Réduire le cumul des risques
Dans l’équipe d’Au Foin de la rue, le sujet est impulsé par une commission bénévole, sous l’angle des publics. Depuis une dizaine d’années, des actions se mettent en place progressivement : dispositif de sécurité en partenariat avec la protection civile, navettes, prévention, dépistages d’alcoolémie, mise à disposition d’eau, prix des softs inférieurs à ceux de l’alcool, etc. Au-delà de la sécurité routière et sanitaire, il s’agit également de prévenir des « comportements excessifs », en cohérence avec les programmes de lutte contre les violences sexistes et sexuelles. À L’Autre canal, SMAC de Nancy, le directeur, Sébastien Étienne, a pris le parti de « rappeler le cadre », noir sur blanc. « Rien d’innovant ou de renversant », mais « un besoin de réinformer les équipes du bar régulièrement ». Depuis septembre 2024, la salle va plus loin en expérimentant des soirées sans alcool fort ni bières fortes, lors des événements terminant à 5 heures. 

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Par Julie Haméon

Légende photo : Lisa Bélangeon, coordinatrice générale du festival Au foin de la rue (Mayenne)

Crédit photo : D. R.

Comment construire un « parcours handicap » ?

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Inti Beziade-Queille

Accueillir un public malentendant, malvoyant, en proie à des troubles mentaux ? Qu’ils suivent des protocoles très établis ou non, les théâtres s’emparent pleinement de cette nécessité.

Inclure un public en situation de handicap au théâtre, ce n’est pas juste adapter des spectacles, cela irrigue tous les services de la structure, comme le disent de concert Angélique Clairand et Éric Massé, à la tête du Théâtre du Point du Jour, à Lyon. Depuis leur arrivée en 2019, ils s’investissent au sein du réseau Théâtres en signes, dont ils sont membres fondateurs et qui compte huit autres lieux, dont le Bateau Feu de Dunkerque, le Mouffetard et l’IVT à Paris, ou encore la Comédie de Valence et le Théâtre du Grand Rond de Toulouse. Les 10 et 11 février prochain, ce réseau se réunira dans le théâtre lyonnais du 5e arrondissement.

Outre les douze représentations en langue des signes à l’affiche cette saison, il s’agit donc bien de former les équipes et de faire du théâtre un lieu repère pour ce public maîtrisant cette langue à part entière et reconnue comme telle par l’État depuis 2005. Une formation en interne est assurée par un professionnel dont la LSF est la langue maternelle. « Il y a un temps d’initiation pour l’ensemble de l’équipe, d’autant que les agents d’accueil sont beaucoup renouvelés chaque saison. Et on a une autre formation thématique, trois à quatre fois par saison, en fonction des spectacles (sur les bouleversements climatiques par exemple pour Le Temps des fins, de Guillaume Cayet) pour qu’on ait du vocabulaire pour échanger avec les spectateurs ou les artistes. On fait des groupes de niveau et on a un référent inclusion dans le théâtre », complète Angélique Clairand.

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Par Nadja Pobel

Légende photo : Inti Beziade-Queille, référente handicap à La Minoterie, à Dijon

Crédit photo : D. R.

Le spectacle s’évalue à l’aune de Paris 2024

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Alexis Michalik

L’organisation des Jeux olympiques de Paris peut-elle inspirer le monde du spectacle vivant ? Quel sera l’héritage de cette Olympiade culturelle ?

Les Jeux olympiques de Paris (JOP) ont enthousiasmé beaucoup de spectateurs grâce à l’organisation de compétitions dans de spectaculaires lieux patrimoniaux : place de la Concorde, esplanade des Invalides, ou encore au pied de la tour Eiffel. L’aménagement de A à Z de ces sites peut s’apparenter à celui qu’effectuent de nombreux festivals de plein air. Dans les jardins du château de Versailles, par exemple, un stade équestre de 16 000 places a été construit de toutes pièces par GL Events pour les épreuves d’équitation et de pentathlon moderne. Soit un budget 25 millions d’euros de la conception à l’exploitation, en passant par la construction du site, dont une piscine de 25 mètres de longueur. Ces lieux, comme ceux de certains festivals, sont hautement « instagrammables ». Arnaud Meersseman, directeur général AEG Presents France (Rock en Seine, Accor Arena, etc.), a été impressionné par le montage des gradins et par l’efficacité du logiciel de billetterie. « Mais ce sont des échelles et des moyens faramineux comparés à ceux des festivals. Nous n’avons pas non plus les mêmes publics. J’adorerais organiser un festival sur le domaine de Versailles ou place de la Concorde ! »

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Par Nicolas Ambre

Légende photo : Alexis Michalik, auteur et metteur en scène

Crédit photo : Julien Pebrel

La scène, côté jardin

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Francesca Poloniato et Céline Rousseau

Deux scènes nationales – Carré-Colonnes et le ZEF – investissent les jardins pour faire culture autrement avec les habitants.

Bien au-delà de projets anecdotiques et éphémères, les deux scènes nationales investissent le jardin, en faisant un véritable axe artistique sinon culturel de leur projet, au même titre que les spectacles. Dans les deux cas, le jardin ne vise pas à attirer de nouveaux publics en salle, mais à créer de nouvelles relations.

Faire du jardin une œuvre 
En Gironde, c’est la crise sanitaire qui a donné l’idée à la directrice, Sylvie Violan, de proposer « du réconfort aux habitants en semant des graines de poésie ». Cyril Jaubert, directeur artistique d’Opéra Pagaï – compagnie associée –, lui répond alors : « Nous allons semer de vraies graines ! » En une semaine, 750 semis sont réalisés par les passants, rassemblés dans le hall du théâtre. Pour leur donner des nouvelles de leur « double végétal », l’équipe lance une « newslaitue » qui raconte l’histoire d’une scène nationale « submergée par le vivant ». Deux mois plus tard, il est temps de planter, et la salle obtient l’autorisation municipale d’occuper un terrain vague à proximité, qu’elle transforme en jardin. En mars 2021, une nouvelle tradition démarre, pérennisée depuis : les semis de printemps. 

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Par Julie Haméon

Légende photo : Francesca Poloniato, directrice, et Céline Rousseau, directrice adjointe du ZEF

Crédit photo : D. R.

Communication : comment s’adresser aux primospectateurs ?

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Apolinne Locquet

Celles et ceux qui accèdent pour la première fois à un lieu de spectacle vivant doivent faire l’objet de toutes les attentions.

Apolline Locquet a fait en début de saison une expérience aujourd’hui commune, plus encore après la pandémie : elle a quitté Paris pour s’installer sur un territoire sans doute plus accueillant et, pour le moins, à plus faible densité de population. Désormais dans le sud-ouest de la France, la directrice de l’expérience client d’Arenametrix est donc devenue, elle aussi, primospectatrice des lieux de spectacle de son environnement immédiat. Elle y a découvert de nouveaux lieux, des habitudes qui ne sont pas les siennes. Surtout, elle s’est étonnée que, à la suite de son premier achat, aucun e-mail spécifique n’ait été adressé à une primospectatrice. « On aurait pu me présenter en quelques mots la configuration des lieux, me dire que je trouverais un bar, que je devais me présenter à l’heure pour éviter les retards que j’ai pu constater et le démarrage tardif de la représentation. Ça fonctionne, pourtant, les taux d’ouverture de ce type d’e-mail (entre 65 et 90 %) montrent bien que le public y voit de la valeur. » Pourtant, témoigne cette spécialiste du marketing culturel, peu de lieux investissent cet espace de la toute première rencontre entre un lieu et son spectateur. Une étape pourtant décisive si l’on espère le fidéliser. 

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Par Cyrille Planson

Légende photo : Apolline Locquet, directrice de l’expérience client, pour Arenametrix

Crédit photo : Julien Pebrel

Vers une certification pour le Off

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Laurent Domingos et Harold David

AF&C, qui coordonne le Festival Off d’Avignon, a travaillé à la création d’un label qui incitera à la professionnalisation des salles et des compagnies qui participent à la manifestation. Avec un contrôle extérieur à la clé.

Réguler le Off ? Plusieurs directions d’AF&C se sont cassé les dents à tenter d’organiser le plus grand marché du spectacle vivant. La loi de l’offre et de la demande pousserait à de la spéculation, voire à des pratiques trompeuses ou hors la loi côté compagnies, mais surtout théâtres. L’idée d’un label est ancienne et a effleuré plus d’une structure. La Fédération des théâtres indépendants d’Avignon (FTIA), organisation créée en opposition à la direction d’alors d’AF&C, y avait réfléchi.

Côté compagnies, les Sentinelles avaient envisagé en 2018 un guide des théâtres assorti de nombreux critères. Initiative reprise par les États généraux du Off. « Est alors apparue l’idée de symétrie entre théâtres et compagnies en leur appliquant à chacun des critères, pas seulement aux lieux, mais à tous les acteurs du Off. » explique Laurent Domingos, coprésident d’AF&C, qui fut représentant des Sentinelles, fédération de compagnies du spectacle vivant.

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Par Nicolas Dambre

Légende photo : Laurent Domingos (à g.), coprésident d’AF&C, ici avec Harold David, également coprésident

Crédit photo : Jérémie Jung / Signatures

« Le problème qu’on traverse est celui du partage de la richesse au sein du jazz et de l’ensemble du champ musical »

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Antoine Bos

Le réseau Association Jazz Croisé (AJC), organise ses rencontres du 2 au 4 décembre à La Dynamo de Banlieues bleues (Pantin). Au programme, des débats sur la situation du jazz et deux soirées concerts avec les lauréats des programmes d’accompagnement du réseau : l’historique Jazz Migration, et le nouveau-né Jazz With. Rencontre avec Antoine Bos, délégué général d’AJC.

Ces rencontres AJC, c’est le temps fort de votre réseau ?
C’est un moment pour se retrouver tous ensemble, en physique et non pas en visioconférence, calé aussi sur un temps associatif assez important (une journée et demie de travail avec nos invités). Cette année, on a un focus sur les programmateurs de lieux et de festivals de la Réunion. C’est assez intense pour nos adhérents qui vont discuter de coopération dans la diffusion, de meilleure circulation des artistes, d’international, et le temps associatif, avec les présentations des activités 2024, des chantiers 2025, et de leurs grands enjeux.

Est-ce ouvert à tous ?
Oui, nous avons aussi des temps qui concernent tous les professionnels du jazz, car il y a très peu d’espaces pour que les acteurs du jazz se retrouvent. Il y a deux soirées de concerts ouvertes avec, au milieu, un buffet qui permet à la profession de se retrouver, et une table ronde dédiée aux dynamiques de coopération entre acteurs du jazz. C’est un débat qui dépasse le cadre d’AJC : comment notre secteur fait face aux contraintes économiques, aux complexités d’ordre écologique, aux questions de diversité, d’égalité de genre, etc. Il y aura le Centre national de la musique, la DGCA, car l’idée c’est aussi de questionner nos partenaires sur leur accompagnement de ces structures de diffusion et de ce travail d’artisanat de la musique.

Vous présentez aussi vos projets : Jazz Migration, bien installé, et Jazz With, plus jeune.
Il a fallu du temps pour mettre Jazz Migration, créé en 2002, à cet endroit-là et ses fondations sont encore relativement fragiles, parce qu’il y a une tension autour de la diffusion des artistes. Mais c’est un projet d’accompagnement de musiciens émergents de jazz et musiques improvisées qui fonctionne bien et qui a porté ses fruits : 250 musiciens, plus de 1 000 concerts en France et en Europe. Depuis 2016, il apporte aux lauréats et finalistes des outils de structuration et de professionnalisation dans le cadre d’un parcours global, adapté aux spécificités du jazz. On reçoit plus d’une centaine de candidatures chaque année, on travaille avec 30 musiciens sur deux ans parce que les cycles de génération durent deux ans [les quatre lauréats 2024 sont Marsavril, Nubu, Sėlēnę et [Na]]. 

C’est un vrai projet d’accompagnement d’artistes émergents ?
Oui. Le monde du jazz et des musiques improvisées de manière générale souffre cruellement d’un manque d’entourage. Et les artistes d’un manque de formation à ces questions. Je pense qu’il n’y a rien de mieux que des structures de diffusion pour le faire. Et avec cette idée, à chaque fois, d’accompagner des artistes français à aller à l’étranger. Pour les programmateurs et pour les musiciens, il y a besoin d’avoir ces connexions. 

Et Jazz With ? 
C’est notre dernier né pour accompagner les groupes français et européens qui ont plusieurs nationalités en leur sein et qui ont des difficultés à trouver des partenaires. AJC travaille depuis des années aux questions de développement international. On invite chaque année autour de 100 professionnels étrangers à découvrir des artistes français, on a soutenu des festivals à Rome, à Berlin, on a des partenariats... Pour Jazz With nous avons fait un appel à candidatures européen, et reçu plus de 100 réponses, ce qui est énorme pour une première. On en a sélectionné trois : TIM, le trio Volkmann/Jarret/Andrzejewski et Weave 4. On travaille avec eux depuis plusieurs mois en les guidant dans leur diffusion, en France et en Europe. C’est un travail d’intermédiaire. On donne à chacun une bourse de 3 000 euros et ils vont jouer devant des professionnels des pays dans lesquels ils veulent travailler, qu’on invite. Notre ambition, c’est que cet argent ne serve qu’à des tournées.

Vous avez des fonds européens ?
Non, ce sont des fonds de nos partenaires, le CNM, le ministère de la Culture, et aussi des fonds propres. Je ne désespère pas d’arriver à en faire quelque chose d’un peu plus lourd pour qu’on soit en mesure de les accompagner un peu plus, car 3 000 euros ce n’est pas énorme dans le montage d’une tournée. C’est un coup de pouce. Ce serait bien qu’on ai non pas trois mais quatre groupes. On avance tout doucement, j’espère mettre autour de la table différents partenaires pour aller un peu plus loin. 

De votre poste d’observation, quelle est la situation du Jazz ?
On sortira début 2025 des données 2023 de nos adhérents. En ayant vu ces chiffres de loin, je vois déjà qu’entre 2023 et 2024 il y a une baisse assez relative de la diffusion, ou en tout cas de l’accueil d’artistes, donc de l’emploi artistique. ça fait quelques mois qu’on nous dit dans le réseau que c’est compliqué et là ça se manifeste en chiffres. Je vois qu’on est face à un problème réel. On a des lieux et des festivals, des structures de diffusion qui ont de moins en moins de marge artistique pour travailler. On a plusieurs structures qui ont préparé leur programmation de septembre à décembre avec beaucoup de coproduction et pas de programmation pure. 

Observez-vous, vous aussi, une hausse des cachets ?
Oui, on a une hausse du coût des cachets pour les grandes têtes d’affiches, aux alentours de 10 %. Mais on a aussi besoin de ces têtes d’affiche dans le développement des publics. Alors que les émergents ou des artistes de longue date se retrouvent avec des cachets équivalents depuis 10 ans. Le problème qu’on traverse est celui du partage de la richesse au sein de ce secteur-là et au sein du champ musical. 

Vos adhérents sont soutenus ?
Au sein du réseau AJC, j’ai une vingtaine, voire une trentaine de structures qui ont des budgets en dessous de 150 000 euros. Ce sont des structures qui sont pourtant de grands organes de diffusion de la musique, qui programment de manière très professionnelle les artistes, et qui, aujourd’hui, ne trouvent pas auprès des tutelles publiques le moindre soutien. Et ça va devenir problématique.

La situation s’aggrave ?
Cette tension économique dure depuis très longtemps. On commence à se rendre compte qu’on a déjà gratté jusqu’à l’os. Je ne connais aucune structure chez moi qui peut s’enorgueillir d’être confortable en ce moment. Je sens la tension partout, à tous les endroits, et pour la première fois de manière aussi importante. 

Pourtant, les projets vivent ?
Sur l’artistique, on a des projets incroyables, et il y a une énergie qui est folle sur Jazz Migration et Jazz With. Notre réseau est parmi les plus actifs, avec une vitalité dingue. C’est bien d’avoir creusé dedans, mais il faut la cultiver. Les politiques publiques auraient à cœur de se rendre compte que le secteur ne peut pas vivre que de cette vitalité. Il faut aussi des moyens pour le faire. 

Propos recueillis par Jérôme Vallette

En partenariat avec La Lettre du Spectacle n°570

Légende photo : Antoine Bos, délégué général d’AJC

Crédit photo : D. R.